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Didier Arino (Protourisme) : "Nos recettes touristiques ne font que baisser"

Par Mathieu D'Hondt

Didier Arino (Directeur du cabinet Protourisme) était ce mercredi l'invité du Grand matin Été sur Sud Radio.

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Le Premier ministre Édouard Philippe réunit ce mercredi le Comité interministériel du tourisme à Matignon dans un contexte qui semble favorable car le secteur touristique s'est relevé cette année et a renoué avec le succès après une année 2016, certes correcte, mais avec des chiffres en baisse. L'objectif désormais est d'atteindre les 100 millions de visiteurs à l'horizon 2020 alors que la France demeure, dans l'esprit des gens, la première destination touristique mondiale. Toutefois, le tourisme est victime de son succès et ceci n'est pas sans conséquences. En effet, cette fréquentation en hausse provoque notamment  la saturation de certains sites. On en parle avec notre invité Didier Arino (Directeur du cabinet Protourisme) qui apporte quelques nuances aux chiffres communiqués.

Bonjour Didier Arino, il y a vraiment un grand mieux cette année, par rapport à l'an dernier où une baisse de la fréquentation a été constatée n'est-ce pas ?

Écoutez, c'était plus qu'une baisse de régime puisque nous avons subi l'an passé une baisse importante des nuitées des clientèles étrangères, il y a eu 5% de baisse dans les hébergements marchands. Ensuite, ces chiffres du tourisme qu'on nous annonce cette année, entre 88 et 89 millions, ne signifient pas grand chose, car il faut souligner que ce ne sont pas des touristes mais des arrivées touristiques et c'est une grande différence. Cela signifie par exemple que celui qui habite en Dordogne et va 10 fois chez lui en Angleterre, il est compté 10 fois comme touriste. D'ailleurs, le paradoxe de ces chiffres, c'est qu'on a quasiment autant de touristes belges qu'il n'y a de Belges en Belgique. De plus, notre situation géographique au cœur de l'Europe fait que nous sommes traversés par de nombreuses nationalités. Il y a beaucoup de touristes de passage. C'est donc un élément de com' de parler de ces "100 millions". La réalité, c'est que nous ne sommes pas à la première position, nous sommes le quatrième pays qui accueille le plus de recettes touristiques, loin derrière les États-Unis, l'Espagne et maintenant la Chine. Notre situation n'a fait que se dégrader depuis 10 ans avec des baisses de parts de marché. Donc cette année, c'est mieux effectivement. Nous avons attrapé au premier semestre 60% de ce que nous avons perdu en 2016 mais la réalité est que nos recettes touristiques ne font que baisser, elles étaient de 43 milliards en 2014, 41 milliards en 2015 et 39 milliards en 2016.

Ce sont donc des résultats mitigés, il faut être pondéré selon vous ?

Il faut être pondéré.On n'a pas créé de chambres d'hôtel depuis de nombreuses années, en tout cas ni hôtels, ni camping, ni villages de vacances...

...cet objectif des 100 millions de visiteurs à l'horizon 2020, est-il raisonnable ? Peut-on réellement l'atteindre ? Sommes-nous équipés pour ça ?

Non, on n'est pas équipé pour atteindre cet objectif. La différence, c'est qu'en moyenne on a une croissance qui est 2 à 3 fois inférieure à celles de nos voisins, c'est ça la réalité. "100 millions", c'est un chiffre qui est lancé comme ça , c'est plus un objectif de communication interne qu'un objectif de chiffre d'affaire. Moi, j'aimerais bien qu'on ait un objectif de chiffre d'affaire, de créations d'emplois, de développement économique.

Aujourd'hui, le tourisme représente combien d'emplois ? Environ 2 millions ? Peut-on créer de nouveaux emplois dans ce secteur ?

Nous avons le potentiel de créer entre 200 000 et 300 000 emplois dans le secteur du tourisme. Mais pour cela, encore faut-il avoir de véritables politiques touristiques, axées sur le développement de projets structurants. Il faut aussi que nos concitoyens aient envie de travailler dans le secteur du tourisme parce qu'on peut effectivement créer beaucoup plus d'emplois mais ce que l'on voit, c'est qu'il y a déjà 20 000 à 30 000 emplois qui ne sont pas pourvus. C'est le cas dans la restauration, mais aussi du côté des moniteurs de voile ou l'encadrement de jeunes par exemple. Cela doit aussi passer par de la formation, le développement de nouveaux métiers, on a beaucoup de retard en matière de numérique par exemple. On manque de grands projets...

>> Retrouvez l'intégralité du podcast de l'interview :

 

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