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Censure : "CNews crie avant d'avoir mal", pour Laurent Joffrin

Par Adélaïde Motte

CNews va-t-elle être censurée ? Alexis Poulin en parle avec Laurent Joffrin sur Sud Radio le 22 février 2024.

CNews
Laurent Joffrin, invité d’Alexis Poulin dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Laurent Joffrin, journaliste, évoque le pluralisme des médias et la situation de CNews dans le Face-à-Face avec Alexis Poulin.

"Chez CNews, c'était difficile de critiquer Bolloré"

Laurent Joffrin a longtemps fait partie de l'Heure des Pros, l'une des émissions phares de CNews, animée par Pascal Praud. "Je suis parti pour une raison précise, c'est que Bolloré a pris le contrôle du Journal du dimanche. J'ai été désigné chaque fois par des actionnaires et à chaque fois, ça a donné lieu à un vote. Là, il y a eu un vote, le propriétaire est passé outre et chez CNews, c'était difficile de le critiquer".

"À Libération, il y a ce système qui fait que c'est l'actionnaire qui propose un directeur de rédaction mais que c'est l'équipe de rédaction qui vote pour l'accepter. Bolloré, ou il intervient ou il fait intervenir par des gens qu'ils nomment."

"Je trouve que le système que j'ai vécu moi est un bon système : l'actionnaire nomme les responsables, la rédaction se prononce par un droit de veto. Ça oblige les deux partis à s'accorder, ça existe au Monde, ça existe à Télérama, aux Echos." Un système qui ne plaît pas à tout le monde.

"Tous les patrons de presse sont violemment hostiles parce qu'ils veulent pouvoir intervenir dans le contenu." Au reste, cette intervention n'est un problème que "quand on change brutalement la ligne d'un journal existant." Un propriétaire va forcément essayer d'influencer un tant soit peu le contenu car "il a besoin de ne pas perdre d'argent, il va avoir tendance à demander aux journalistes de ménager les annonceurs."

"Le pluralisme, c'est que l'ensemble des médias sont divers"

Pour Laurent Joffrin, il est absurde de crier à la censure. "Le but de l'Arcom n'est pas d'instaurer une censure, CNews crie avant d'avoir mal. Il y a eu un avis du Conseil d'État disant 'il faut mieux respecter le pluralisme'." Cette obligation de pluralisme remonte à loin. "L'État a demandé à ce que ces chaînes signent une sorte de contrat, s'efforcent de représenter la diversité, de représenter le pluralisme entre les courants politiques. C'est une charte qui a été élaborée en 86, c'est le statut qui a été proposé aux chaînes privées qui voulaient avoir une fréquence gratuitement".

"Cette loi a été avalisée par toutes les majorités successives, s'il y avait une censure ça se saurait, depuis 40 ans". "Le pluralisme c'est que l'ensemble des médias sont divers, mais c'est spécial pour ces chaînes-là parce qu'on est obligés de les donner à certaines chaînes et pas à d'autres."

"On n'ira pas dans la censure"

"Le système global est pluraliste, on peut changer de chaîne. Comme il y a moins de chaînes, l'État a demandé aux chaînes de ne pas être trop militantes, de parler à tout le monde. C'est un peu logique, on se retrouverait avec la première chaîne pour Ciotti, la deuxième pour Mélenchon, la troisième pour Roussel, ce n'est pas ça qu'on attend d'un système de télévision. Des chaînes d'info, il y en a une dizaine". "Le débat c'est sur l'esprit d'une loi, c'est l'interprétation de la loi par le Conseil d'État qui est objet à débat. L'idée de demander aux chroniqueurs ou aux experts de présenter leur pedigree politique est absurde, il y en a qui sont inclassables, ou qui ne veulent pas être classés." Alors comment l'Arcom prévoit-elle de procéder ? "Ils savent pas", assène Laurent Joffrin, néanmoins certain qu'"on n'ira pas dans la censure. Ça va être une discussion de chiffonniers et à mon avis, ça n'aboutira à rien."

"CNews a le droit de s'engager"

Alors CNews est-elle une chaîne d'extrême-droite ? "CNews a le droit de s'engager, c'est pas la question. Ils respectent le temps de parole des politiques mais il y a une préférence pour les chroniqueurs de droite ou d'extrême-droite". "Je savais où je mettais les pieds, ça ne me gênait pas", précise Laurent Joffrin qui a "toujours été bien traité" chez CNews. "Je les critique politiquement mais humainement ils sont très gentils." En plus des opinions majoritaires des chroniqueurs, "à CNews, il y a une formule qui fait que l'animateur donne son avis, donc l'arbitre est toujours du côté de l'équipe adverse." La difficulté avec le groupe Bolloré est aussi la porosité en CNewsEurope 1 et le Journal du dimanche. "Pascal Praud fait CNews tous les jours, il fait aussi Europe 1. Ils ont tous la même partition, ça peut déséquilibrer la discussion."

"En France, la presse est libre globalement", conclut Laurent Joffrin. "La loi est très libérale, c'est libre sauf exception, il y a en a cinq, dont la diffamation, le racisme, l'appel à la haine et au meurtre". "Je ne dis pas que tout va bien, c'est une question de proportion. Il faut se battre, c'est jamais acquis", admet-il néanmoins. "Quelle est l'information importante qui a été cachée par le système ? Un truc important," demande Laurent Joffrin qui explique qu'on lui cite la plupart du temps Mazarine, fille cachée de Mitterrand mais "à l'époque, on n'entrait pas trop dans la vie privée des hommes politiques, c'est un cas quand même très étroit."

Plus récemment, on peut citer certains points de la crise sanitaire, et notamment les effets secondaires des vaccins, mais "il y en avait tous les jours. Vous pouvez dire telle télé n'en a pas parlé mais celle d'en face en a parlé, le résultat est le même". "Les vaccins n'étaient pas dangereux, il y avait des effets secondaires mais toutes les études qu'on a vues ont montré qu'il n'y en avait pas plus que pour les autres vaccins, les études qui ont eu lieu depuis ont montré que les vaccins ont sauvé des vies."

Dans ces conditions, "donner la parole à égalité entre les anti-vax et les pro-vax, c'est pas sérieux, il y a quand même une éthique du débat, il y a quand même des faits, ces faits doivent être vérifiés, parfois ils sont incertains, il faut toujours être critique vis-à-vis de ce qu'on nous raconte."

 Cliquez ici pour écouter l’invité d’André Bercoff dans son intégralité en podcast.

Retrouvez “Le face à face” d’André Bercoff du lundi au jeudi  à 13h dans Bercoff dans tous ses états Sud Radio.

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