single.php

Le cinéaste Christophe Ruggia jugé en appel pour agressions sexuelles sur Adèle Haenel mineure

Un an après un procès électrique dans cette affaire emblématique du #MeToo du cinéma français, le cinéaste Christophe Ruggia est jugé vendredi en appel à Paris pour agressions sexuelles sur l'actrice Adèle Haenel entre ses 12 et 14 ans.

Gregoire CAMPIONE - AFP/Archives

Un an après un procès électrique dans cette affaire emblématique du #MeToo du cinéma français, le cinéaste Christophe Ruggia est jugé vendredi en appel à Paris pour agressions sexuelles sur l'actrice Adèle Haenel entre ses 12 et 14 ans.

Condamné en première instance à quatre ans de prison, dont deux ferme à effectuer sous bracelet électronique, le réalisateur de 60 ans est à nouveau confronté dans le prétoire à l'actrice doublement césarisée de 36 ans, qui a depuis tourné le dos aux tapis rouges et plateaux de tournage.

Une jeune adolescente faisant ses premiers pas de comédienne, un réalisateur démiurge vingt-quatre ans plus vieux qu'elle, un tournage "totalement anormal" avec des mineurs qui dérivent vers un système d'"emprise": ce #MeToo français interroge les rapports du pouvoir dans le monde du cinéma et leur possible instrumentalisation.

Le scandale a éclaté il y a six ans, en novembre 2019, lorsque dans une enquête de Mediapart Adèle Haenel accuse Christophe Ruggia d'agressions sexuelles de 2001 à 2004, dans la foulée de l'éprouvant tournage du film d'auteur "Les diables", où le réalisateur lui a offert son premier rôle de cinéma.

De manière constante, de sa première prise de parole publique au procès de décembre 2024, Adèle Haenel décrit des caresses répétées et non consenties de la part de Christophe Ruggia sur son corps de collégienne à l'occasion de rendez-vous chez celui-ci, les samedis après-midi durant plus de deux ans.

"Et moi je me tends, mon corps se crispe, je me recroqueville dans un coin du canapé", a témoigné à la barre, en colère, la comédienne en première instance.

Selon ses déclarations durant l'enquête, Christophe Ruggia la menaçait de retourner "dans le néant" si elle le rejetait, "à cette chose nulle" qu'elle était avant qu'il ne lui permette sa première apparition sur grand écran.

- "Ferme ta gueule !" -

Son récit a été qualifié à l'audience de "pur mensonge" par Christophe Ruggia qui dément catégoriquement les faits depuis leur révélation. Devant le tribunal correctionnel, il a affirmé n'avoir "jamais" été "attiré sexuellement" par l'enfant qui dégageait selon lui une "sensualité débordante".

Adèle Haenel au tribunal de Paris, le 3 février 2025

Adèle Haenel au tribunal de Paris, le 3 février 2025

GEOFFROY VAN DER HASSELT - AFP/Archives

"Il fallait lancer un #MeToo en France et c'est tombé sur moi", a regretté le cinéaste qui préparait un nouveau film avec des adolescents au moment de la publication de l'article de Mediapart.

Ses démentis répétés au procès ont excédé Adèle Haenel au point que celle-ci a interrompu son interrogatoire en hurlant "Mais ferme ta gueule !" avant de quitter la salle d'audience, comme un écho à son départ de la cérémonie des César en 2020 pour dénoncer le sacre de Roman Polanski.

Dans son jugement condamnant par ailleurs Christophe Ruggia à indemniser Adèle Haenel à hauteur de 15.000 euros pour son préjudice moral et 20.000 pour ses années de suivi psychologique, le tribunal de Paris a estimé que le prévenu a profité de son "ascendance" sur l'actrice débutante, "conséquence de la relation instaurée" pendant le tournage du film "Les diables".

À l'occasion des rendez-vous hebdomadaires à son domicile, Christophe Ruggia "continuait d'exercer son autorité de réalisateur, (l'adolescente) n'était pas en mesure de s'opposer ni de s'extraire de cette emprise", ont estimé les juges.

Contactés par l'AFP, les avocats des deux parties n'ont pas souhaité s'exprimer avant l'audience à la cour d'appel de Paris.

Après son rôle le plus marquant dans "Portrait de la jeune fille en feu" (2019) de la réalisatrice Céline Sciamma, devenue une œuvre féministe et lesbienne de référence, Adèle Haenel a rompu avec le 7e art à partir de 2020 pour se consacrer au théâtre et au militantisme de gauche radicale.

Dans une lettre publiée par Télérama en 2023, elle justifiait son départ du cinéma "pour dénoncer la complaisance généralisée du métier vis-à-vis des agresseurs sexuels, et plus généralement, la manière dont ce milieu collabore avec l'ordre mortifère écocide raciste du monde tel qu'il est".

Par Alexandre MARCHAND / Paris (France) (AFP) / © 2025 AFP

L'info en continu
17H
16H
15H
14H
13H
12H
Revenir
au direct

À Suivre
/