Le tristement célèbre campement surnommé "la colline du crack", situé Porte de la Chapelle (XVIIIe arrondissement de Paris) en bordure du Boulevard périphérique, a été évacué ce mercredi par les forces de l'ordre. Depuis plusieurs semaines, trafiquants et consommateurs y avaient pratiquement élu domicile, se livrant de jour comme de nuit à un gigantesque trafic au vu et au su de tous. Reportage.
"On veut juste respirer et travailler, on a assez souffert dans ce quartier"
Une centaine de toxicomanes ont ainsi été délogés des lieux à la grande satisfaction des riverains qui assistaient médusés et impuissants à cette sinistre ronde au quotidien. Gérant d'une station service à proximité, Dembélé a assisté à l'évacuation depuis la vitrine de son commerce. Au micro de Sud Radio, il ne cache pas son soulagement. "Je suis très soulagé ! Il n'y avait plus de clients, on a perdu au moins la moitié de la clientèle", souffle-t-il, sans toutefois se montrer dupe. "L'évacuation, c'est bien mais ils vont laisser les maîtres-chien jusqu'à lundi mais après ? Que va-t-il arriver après ?", questionne-t-il, un brin fataliste.
De son côté, Naghim - restaurateur - a perdu 20 % de sa clientèle depuis le développement du campement. À ses yeux, une opération de ce type était vitale pour la survie du quartier mais elle doit être pérenne car rien ne dit que les toxicomanes ne reviendront pas dans un futur proche. "J'espère qu'ils ne vont pas revenir demain. J'espère qu'on va nous laisser travailler tranquille et que les riverains vont commencer à revenir dans les commerces (...) On veut juste respirer et travailler, on a assez souffert dans ce quartier", nous lâche-t-il, un peu désabusé.
Interrogé par nos soins, Pierre Liscia - élu LR de l'arrondissement - se satisfait de l'évacuation qui était devenu une nécessité. Cependant, il ne cache pas son inquiétude quant à l'évolution de la situation à moyen terme, car la prise en charge des toxicomanes n'est pas suffisante, selon lui. "Aujourd'hui, ces personnes sont orientées vers des hébergements d'urgence comme ceux que l'on met en place pour les migrants, sauf que l'on n'est pas sur la même population", déplore-t-il ainsi. "La crainte est de voir le problème, non pas résolu, mais déplacé ou éparpillé", ajoute-t-il.
L'évacuation n'a donc pas dissipé tous les doutes et la crainte de voir les toxicomanes revenir prendre possession des lieux est prégnante. Il faut dire que depuis 2006, pas moins de 15 campements de ce type ont été évacués sur place.
Un reportage d'Alfred Aurenche