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Annonces d'Emmanuel Macron: gilets jaunes et oppositions pas convaincus

Par Félix Mathieu

Exercice inédit depuis le début de son quinquennat, Emmanuel Macron aura délivré presque deux heures d'allocution puis répondu aux journalistes. Une conférence de presse censée conclure le grand débat national. Le président de la Republique confirme des mesures attendues sur le pouvoir d'achat, mais pas de retour de l'impôt sur la fortune ou d'annonce concernant le référendum d'initiative citoyenne réclamés par les gilets jaunes. Ces derniers ne sont pas convaincus, et entendent rester mobilisés. L'opposition dénonce également des réponses qui n'en sont pas.

Reportages Sud Radio de Benjamin Glaise, Lionel Maillet, Clément Bargain, Mathilde Jullien

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Les annonces sur le pouvoir d'achat

Baisse "significative" de l'impôt sur le revenu

Une promesse en direction des classes moyennes: le chef de l'Etat s'engage à baisser "significativement" l'impôt sur le revenu : "Combien? C'est au gouvernement de définir le quantum, mais il me semble que, environ 5 milliards d'euros en plus de ce qui a déjà été fait, ça sera un geste significatif".
 

Retraite minimale de 1000 euros, prime défiscalisée pérennisée

Les retraites seront ré-indexées sur l'inflation dès le 1er janvier, pour ceux qui touchent moins de 2000 euros, et pour tous les retraités à partir de 2021. Le chef de l'Etat plaide aussi pour un nouveau montant minimum de la pension de retraite: "Je veux que ce qu'on appelle le minimum contributif, c'est à dire la retraite minimale qu'on touche quand on a travaillé toute sa vie, soit de 1000 euros: ça c'est juste. Malheureusement, on hérite d'un système. Je ne peux pas dire à tous ceux qui n'ont pas cotisé ou insuffisamment, qu'on va corriger les situations passées. Cela, on ne sait pas le faire".

Pour les salariés, la prime exceptionnelle défiscalisée, mise en place au début du mouvement des gilets jaunes, sera pérennisée. Le chef de l'Etat exclu de nouveau tout retour de l'impôt sur la fortune, que demandaient les gilets jaunes.

Travailler plus longtemps

Pour financer ces mesures, pas question de toucher aux 35 heures, ni aux jours fériés ou à l'âge légal de départ en retraite, mais Emmanuel Macron souhaite un allongement de la durée de cotisation : "Le gouvernement et parlement, peuvent regarder si on peut allonger la période de référence, sans bouger l'âge légal, pour avoir un système de décote qui incite à travailler davantage, mais dans une option de libre choix".

 

Institutions, services publics...

Classes limitées à 24 élèves jusqu'au CE1, moratoire sur les fermetures d'hôpitaux et d'écoles jusqu'à 2022, création de maisons des services publics dans chaque canton, réorganisation de la fonction publique (moins en en administration centrale, davantage sur le terrain), suppression de l'Ecole nationale d'administration (ENA)... Côté institutions, le chef de l'Etat plaide pour 20% de députés élus à la proportionnelle à l'Assemblée nationale ainsi qu'un nouvel acte de décentralisation. Les Gilets Jaunes voulaient le RIC (référendum d'initiative citoyenne), le président leur donnera le RIP (référendum d'initiative partagée, avec les parlementaires).

 

Réaction côté gilets jaunes: "c'est de l'enfumage"

Ni référendum d'initiative citoyenne (RIC), ni retour de l'impôt sur la fortune (ISF). Les annonces du chef de l'Etat sont loin d'avoir calmé la colère d'une dizaine de gilets jaunes réunis pour l'écouter à Marseille. "Il me met encore plus en colère !", lance l'une d'eux. "C'est de l'enfumage total", renchérissent d'autres: "C'est toujours de son côté, travailler plus pour gagner moins. On n'y croit plus, on ne veut plus le croire, on ne veut plus rien savoir de lui".Des gilets jaunes marseillais réunis dans la villa de George, salarié de l'informatique, pas du tout calmé par la baisse de l'impôt sur le revenu. "Celui qui est pauvre, ça ne va rien lui changer. Il ne finit pas son mois, on ne fait rien pour lui !"

La ré-indexation des petites retraites sur l’inflation constitue peut-être la seule bonne nouvelle pour cette ancienne comptable. "C'est le minimum qu'il pouvait faire. J'aurais espéré qu'il nous annonce une baisse, voire une suppression de la TVA sur les produits de consommation courante." 

Aude, l’assistance sociale, ne se voit pas du tout travailler jusqu’à 64 ans: "à cet âge, on n'a plus la même manière de voir les choses que quand on en a 20 ou 30. Ça n'est plus gérable ! Qu'on soit assistante sociale, pompier, policier, cuisinier, éboueur... c'est impossible !"

Certains monteront à paris samedi matin, d’autres restent à Marseille, mais tous vont encore manifester.

"C'est maintenant qu'on crève la dalle, qu'on a besoin d'argent !"

Dans un café en région parisienne, Marie-Jeanne et Thomas n’en peuvent plus de ces longs discours: "C'est pas en nous donnant des miettes qu'il va remonter le pouvoir d'achat. Venez avec nous, voir la souffrance d'un gilet jaune !". Edwige est tout aussi déterminée à rester mobilisées: "On doit rester le moustique qui pique tout le temps, qu'on n'arrive pas à éliminer ! On doit rester ça".

 

Réactions politiques mitigées de gauche à droite

Ian Brossat, tête de liste PCF aux élections européennes

>>> Macron ne répond rien

Emmanuel Macron a ceci de particulier que, même quand on n'en attend rien, on est déçu quand même ! Cela fait six mois qu’il y a une colère sociale dans ce pays. Et à ces gens là, Emmanuel Macron ne répond rien, sinon qu’il va falloir travailler plus pour gagner autant, voire moins.

Caroline Cayeux, maire divers droite de Beauvais 

>>> La décentralisation, c'est à dire?

Il a simplement dit qu'il allait mieux répartir les compétences, mais il ne définit pas les moyens ni le cadre d'intervention, donc nous attendons des précisions. Nous resterons assez exigeants sur la forme que prendra cette décentralisation. Il y a un point sur lequel rien n'a été dit, c'est le scénario de remplacement de la taxe d'habitation qui représente 20 milliards d'euros, soit le tiers des recettes fiscales du bloc communal. Donc sur ce dernier point, nous seront très attentifs et très vigilants.

 

Karl Olive, maire LR de Poissy, fondateur de Génération Terrain 

>>> Manque de détail, au delà des intentions

Le président Macron a ouvert certaines pistes, mais j'aurais aimé qu'il aille plus loin dans le détail. Car faire des économies en supprimant l'ENA, c'est de la symbolique. Il faut vraiment faire un diagnostic de toutes ces dépenses conséquentes qui sont faites sans pilotage financier. Donc j'aurais aimé qu'il aille davantage dans les détails, sur cette France moyenne, sur le pouvoir d'achat. Comment demain une maman isolée peut avoir plus de pouvoir d'achat? Est-ce qu'elle doit avoir une tranche d'impôt qui démarre à 5%, là où elle démarre aujourd'hui à 14%? On aurait pu attendre ces précisions de la part du chef de l'Etat.

 

Danielle Simonnet, porte-parole de la France insoumise 

>>> À côté de la plaque sur la question démocratique

 

Ce monarque ne veut pas entendre que, dans ce pays, les gens n'arrivent pas à boucler les fins de mois. Pas de réponse sur l'augmentation des salaires, la redistribution des richesses, la TVA qui est l'impôt le plus injuste ! Finalement, il y a juste la ré-indexation des retraites en dessous de 2000 euros. Mais surtout, il est complètement à côté de la plaque sur la question démocratique: il s'oppose au RIC, au vote blanc. Et son référendum local ne donne absolument aucune garantie que les citoyens puissent exercer leur souveraineté sur des sujets essentiels.

 

Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national (RN) 

>>> Le pire est devant nous

 

Il ne regrette rien de ce qu'il a fait, il ne se remet pas en question. Il garde le cap de sa politique qu'il va même accélérer. Emmanuel Macron va demander des efforts supplémentaires aux Français, il passé à côté de réformes essentielles pour notre pays, et il nous a livré une série d'ajustements qui ne changeront rien au quotidien des Français. Ce sont des artifices. Il donne quelques miettes ici et là aux Français pour les occuper, mais le pire est devant nous, c'est l'accélération de la politique macroniste. Cette politique qui amène à plus de chômage, plus d'insécurité, plus de déconstruction du modèle social Français. Je crois qu'il n'y a plus d'illusion à se faire aujourd'hui, sur le président de la République.

 

Brune Poirson, secrétaire d'Etat auprès du Ministre de la Transition écologique 

>>> Des mesures radicales !

Il faut qu'on rentre maintenant dans le détail des mesures annoncées par le président de la République, mais peut-être que certains avaient déjà décidé avant d'avoir écouté le président de la République, qu'ils ne seraient pas convaincus. Il y a des mesures radicales ! Y a t-il déjà eu, en France, un grand débat avec un président qui dit '5 milliards de baisse d'impôts', qui supprime l'ENA, qui annonce baisser le nombre de parlementaires? Au sommet de l'Etat, il y a des personnes qui ont pas forcément intérêt à ce que les choses changent. Eh bien ça, le président de la République veut le balayer !

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