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"C'est une histoire de couple entre la France et Israël : un grand amour et un divorce"

Par Benjamin Jeanjean

Journaliste d’investigation et auteur du livre Histoires secrètes France-Israël (1948-2018), Vincent Nouzille était l’invité du Grand Matin Sud Radio ce jeudi pour revenir sur les relations tumultueuses entre la France et Israël depuis la création de l’État hébreu.

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Entre la France et Israël, les relations ne sont plus un long fleuve tranquille depuis bien longtemps. Auteur du livre Histoires secrètes France-Israël (1948-2018), le journaliste d’investigation Vincent Nouzille revient pour Sud Radio sur une histoire compliquée entre les deux peuples, une histoire qui avait pourtant bien commencée. "Pourquoi est-ce que c’est si électrique entre la France et Israël ? Il y a en fait presque une histoire de couple entre les deux. Ça commence par un grand amour, puis il y a un divorce, et après on continue de s’envoyer de la vaisselle à la figure !", déclare-t-il avant de revenir sur les premiers pas idylliques de la relation entre les deux pays.

"Pendant 20 ans, nous sommes l’allié politique et diplomatique d’Israël"

"La lune de miel commence en 1948 et va se poursuivre jusqu’en 1967 et la rupture autour du Général de Gaulle et de la guerre des Six Jours. Pendant ces vingt ans, nous sommes l’allié politique et diplomatique, c’est la France qui arme Israël et qui lui fournit l’arme atomique. Dans le fond, il y a au sein de la classe politique française un grand courant sioniste, des gaullistes aux socialistes, en passant par François Mitterrand et Guy Mollet qui va soutenir le jeune État hébreu aux côtés de Shimon Pérès et David Ben Gourion, qui sont des travaillistes, donc socialistes", rappelle-t-il.

Mais les années 1960 marquent un tournant majeur dans le rapport entre les deux pays. "Ça va mal tourner. Après la guerre d’Algérie, le Général de Gaulle commence à rééquilibrer sa politique . Il ne peut plus être exclusif avec Israël et renoue avec des pays arabes. Ça va donc commencer à se tendre un petit peu. Et évidemment, la guerre des Six Jours arrive en 1967 et de Gaulle dit aux Israéliens : "Si vous tirez les premiers, vous êtes l’agresseur, et je dénoncerai l’agresseur". Et c’est ce qu’il fait, ce qui va énormément fâcher les Israéliens, qui considèrent alors être trahis par la France. Ils se sentaient menacés par leurs voisins, ils ont attaqué les premiers, ont gagné en six jours, et De Gaulle les punit finalement avec un embargo sur les armes et une déclaration restée célèbre : "Le peuple juif est sûr de lui-même et dominateur". Cette petite phrase est considérée comme antisémite par les Israéliens", souligne Vincent Nouzille.

"Entre Macron et Netanyahou, les choses ont vite commencé à se gâter"

Pour le journaliste, la pression de la hausse galopante de la démographie des pays arabes voisins d’Israël n’est pas ressentie comme un danger par les dirigeants de l’État hébreu fondé en 1948. "Dans la psychologie des dirigeants israéliens, cette réflexion sur le thème du temps qui presse n’a pas de prise sur eux. Ils n’y croient pas, bien au contraire. Pour eux, chaque jour gagné est un jour de plus pour Israël. Au fur et à mesure, ils vont donc bétonner et solidifier leurs positions. Pour les territoires occupés depuis 1967, ils ont commencé à négocier pour le Sinaï, puis la bande de Gaza, mais ne veulent jamais allé très loin. Et surtout, c’est la droite israélienne qui tient le pays depuis presque 40 ans", affirme-t-il.

Aujourd’hui, Vincent Nouzille constate que les relations franco-israéliennes oscillent entre la cordialité et la prise de distance. "Nous sommes sortis d’une période d’extrême proximité avec Nicolas Sarkozy puis François Hollande. Avec Emmanuel Macron, Benyamin Netanyahou est invité à l’anniversaire de la rafle du Vél d’Hiv, c’est la première fois pour un Premier ministre israélien. Ça se passe plutôt bien, Emmanuel Macron l’appelle par son surnom «Bibi» et il explique que l’antisionisme est une forme d’antisémitisme. Pour les Israéliens, cette phrase vaut de l’or. Mais très rapidement, à partir de l’automne les choses vont commencer à se gâter. La France n’est pas d’accord avec la position de Trump sur Israël et considère que Jérusalem doit faire l’objet d’une négociation globale et non pas unilatérale. À Gaza aussi, les choses se sont récemment détériorées et la France a condamné l’usage disproportionné de la force par Israël. Et enfin, la France avait largement contribué à l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien, qui a été cassé par Trump avec le soutien très actif des Israéliens", énumère-t-il.

Réécoutez en podcast toute l’interview de Vincent Nouzille dans le Grand Matin Sud Radio

 

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