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L’affaire Urvoas et l’indépendance, ou non, du parquet

Couper le lien entre l’exécutif et le parquet, ce serait faire un pas de trop dans l’indépendance judiciaire.

 

L’affaire Urvoas, qu’on nomme ainsi par abus de langage, parce qu’au fond, on ne sait pas grand-chose de cette histoire et de sa portée et qu’il faut éviter de juger et de lyncher avant de savoir si une faute a été commise et si elle est d’une réelle gravité.

En attendant que le parquet de la Cour de Justice de la République se prononce, la transmission par l’ancien Garde des Sceaux d’un document à Thierry Solère, visé par une enquête préliminaire pour fraude fiscale a débouché sur une de ces polémiques dont notre société de l’information et des réseaux sociaux a le secret, et qui mettent les politiciens en panique, au point d’engendrer, dans l’emballement médiatique et l’émotion, des réformes dont plus personne ne pèse sereinement le pour et le contre.

Naturellement, rien n’est innocent et il se trouve toujours quelques groupes de pression pour instrumentaliser la polémique, l’indignation populaire ou cette forme d’hystérie collective qui se propage régulièrement sur les réseaux sociaux.

Ici, tous les représentants des magistrats et ceux qui détestent tellement l’État qu’à son autorité, ils préféreraient le gouvernement des juges. Ceux dont j’ai déjà parlé, qui veulent faire la démocratie par le droit plutôt que le droit par la démocratie.

Pour eux, l’affaire Urvoas est une aubaine, une occasion à saisir. Ils nourrissent la polémique en espérant que cette fois-ci sera la bonne, que cette fois-ci, le scandale accouchera de l’indépendance du parquet.

Ils jouent sur du velours. Prononcer aujourd’hui le mot ‘indépendance’, c’est passer pour un saint. Le pouvoir exécutif, l’État, le gouvernement, c’est le mal. L’indépendance, c’est le bien.

Qu’un élu ait des comptes à rendre au peuple, c’est mal. Mais qu’un juge soit la seule personne qui n’ait de compte à rendre à personne dans la société, c’est bien.

Sauf, bien sûr, quand le juge vous donne tort. Là, ce n’est plus bien du tout.

Le gouvernement des juges, c’est le gouvernement de ceux qui n’ont de compte à rendre à personne, sinon parfois à leurs pairs. Mais de quoi le juge tire-t-il sa légitimité ? De sa seule compétence juridique présumée issue de sa réussite au concours d’entrée de l’école de la magistrature, fortifiée par l’expérience.

Cela en fait le serviteur compétent de l’institution judiciaire, dont le premier rôle est d’empêcher que chacun se fasse justice lui-même. Le procès, c’est le contraire de la vengeance. Mais cela ne fait pas du juge l’incarnation de la Justice. Le juge dit ce qui est licite ou non et pas ce qui est juste ou injuste.

C’est au gouvernement de gouverner et au Parlement de légiférer au nom d’une certaine idée de ce qui, précisément, est juste ou injuste, d’en être responsable devant le peuple. Couper le lien entre l’exécutif et le parquet, ce serait faire un pas de trop dans l’indépendance judiciaire.

Décision lourde de conséquences. Il n’y aurait plus de politique pénale, ce serait les juges qui la feraient. Où donc le peuple aurait-il, alors, son mot à dire ?

S’indigner de la faute réelle ou supposée d’un ministre, après tout, quoi de plus naturel en démocratie ? L’instrumentaliser pour affaiblir un peu plus l’État et la République, quoi de plus dangereux ?

Écoutez la chronique d'Henri Guaino dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard

 

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