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1,6 million d’euros à ses employés : la leçon d’économie d’un patron de PME

La décision de Jean-Louis Brissaud, PDG de Starterre, de reverser 1,6 million d’euros à ses employés a agité la presse et les réseaux sociaux ce week-end. Un choix qui relance le débat sur les méfaits de la financiarisation de l’économie.

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On a beaucoup parlé de ce chef d’entreprise du Rhône qui a décidé de distribuer 1,6 million d’euros de ses profits à ses 103 salariés pour le 25ème anniversaire de la création de son entreprise. Il ne s’agit pas d’une prime d’intéressement mais d’une prime de fidélité puisqu’elle est calculée en fonction du temps passé dans l’entreprise. Un salarié avec 25 ans d’ancienneté touchera ainsi une prime de 35 000 euros, ce qui est notable à une époque où le dénigrement du CDI et même du salariat est à la mode.

À lire aussi l’interview de Jean-Louis Brissaud, PDG de Starterre : "Quand vous êtes dans le partage, vous pouvez emmener vos salariés au bout du monde"

Cet exemple nous rappelle que le modèle de la start-up et de l’autoentrepreneur n’est pas universel, et que l’entreprise est une communauté de travail, une collectivité humaine, ce qu’occulte la financiarisation de l’économie. Dans le monde de la finance reine, l’entreprise n’est qu’un porte-feuilles d’actifs financiers qui cherche à garantir le revenu de l’actionnaire plutôt que celui du salarié

Un coup de com’ ? Il est clair que ce n’était pas le but. Le but était de récompenser la fidélité. L’effet de com’ est un effet secondaire qui témoigne de la forte attente de la société pour des manières de gérer autres que la gestion par le stress et le manque de considération pour des personnes réduites à de simples coûts de production.

L’entreprise doit certes être rentable, mais est-ce une raison pour robotiser les gens et revenir aux Temps modernes de Charlie Chaplin ? Une entreprise où les salariés sont malheureux est, à la longue, moins performante qu’une entreprise dans laquelle ils sont heureux de travailler. Ceux qui nous expliquent à longueur de temps que les gens travaillent mieux et sont plus productifs quand on les met sous tension devraient regarder toutes les études sur ce sujet. Alors qu’il y a peu d’indices nous montrant qu’une grande flexibilité du marché du travail crée beaucoup d’emplois, il y a en revanche une grande abondance d’études pour étayer l’idée que la productivité est largement conditionnée par des facteurs tels que la considération, le sentiment de justice et d’équité, la reconnaissance, etc. Ce sentiment d’appartenance qui fait que les gens s’impliquent vraiment dans ce qu’ils font était appelé jadis l’affectio societatis.

De grandes réussites françaises ont été accomplies avec ces principes : Francis Bouygues, Marcel Dassault ou encore François Dalle, PDG emblématique de L’Oréal. Les psychologues et sociologues du travail nous l’ont appris depuis les années 1920. Un grand psychologue australien avait monté une expérience pour mesurer l’accroissement de la productivité en cas d’intensité lumineuse plus forte. Il s’est rendu compte que ce n’était pas du tout l’intensité de l’éclairage qui augmentait la productivité mais le fait-même qu’on s’intéressait au salarié...

L’entreprise doit toujours arbitrer entre l’adaptation à la conjoncture et la nécessité de conserver des compétence et une main-d’œuvre impliquée, car le travail n’est pas une marchandise. Une marchandise est passive, alors que les gens réagissent.

Il y a trois leçons à cette histoire. Premièrement, on ne bâtit pas la prospérité d’un pays ou d’une entreprise dans la durée avec des travailleurs jetables ou précaires. Deuxièmement, les mêmes qui veulent que toutes les collectivités humaines soient transitoires et éphémères veulent diluer les entreprises et les nations dans le marché. Troisièmement, la participation si chère au Général de Gaulle est plus que jamais d’actualité.

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