"D’abord il faut comprendre que l’on est dans un système qui est fait d’injonctions. Il n’y a rien de nouveau depuis la société de consommation mais maintenant on est dans une société d’ultra communication", juge François Belley. "Il faut qu’on rentre dans une logique de parole à tout prix, à tout va et tous azimuts, quelle que soit la nature, quelle que soit la vérité et quel qu'en soit le contenu".
"La libération de la parole a un côté intéressant pour les victimes et je pense que c’est une avancée intéressante. En revanche, et c’est ça mon objet d’étude, je ne regarde pas ça sous cet angle là, je me demande à qui ça profite ?", explique François Belley à propos de son livre Le nouveau spectacle politique. "Je regarde à chaque fois qu’il y a une parole qui se libère, quelle séquence se construit, quelles sont les audiences et qui en ressort grandi à chaque fois. Vous verrez qu’il ne s’agit jamais de la victime. Le vainqueur c’est le système du social-médiatique, le spectacle".
"Le spectacle dégage l'homme politique traditionnel"
"Le spectacle emporte tout", juge François Belley. "Il est en train d’emporter tout sur son passage, je m’explique. Le spectacle a déjà dégagé les partis politiques. Aujourd’hui ça n’intéresse plus personne, vous aurez quand même remarqué qu’ils n’apparaissent presque plus du tout sur les affiches de campagne. Cela m’amène au deuxième point, le spectacle a emporté aussi les journalistes politiques qui ont été remplacés par des influenceurs. C’est eux aujourd’hui qui renouvellent de ‘fraîcheur’ le débat politique. On le voit bien quand des influenceurs vont interviewer des députés, des ministres, des portes parole, et même le président de la République".
"On en arrive au troisième point", explique François Belley au micro de Sud Radio. "Maintenant le spectacle est en train aussi d’emporter, de dégager l’homme politique traditionnel. Il est remplacé par ce que j’appelle le néo-politique, c’est-à-dire quelqu’un qui ne vient pas du sérail, qui ne vient pas de la profession. Ce n’est pas un professionnel mais vous verrez que ce qui lie l’épidémiologiste, l’avocat, l’essayiste, le chef étoilé, etc. c’est leur capacité à créer du spectacle et à rentrer dans ce que j’appelle l’écran du spectacle. Et surtout à ne plus jamais en sortir. C’est ça l’idée, pouvoir entrer dans l’écran du spectacle et ne plus avoir à en ressortir aussi".
"Il cherche le pouvoir médiatique"
"À ce stade, je pense que nous sommes à la naissance du néo-politique, celui-là ne cherche pas l'élection, il cherche le pouvoir médiatique", explique l’auteur de Le nouveau spectacle politique. "Il veut exister dans l’écran du spectacle. Il y a deux séquences intéressantes à étudier pour illustrer le phénomène".
"La première, c’est la séquence, assez longue d’ailleurs, du coronavirus qui a fait émerger des nouvelles figures qui ne sont pas du tout politiques. Ces personnes sont devenues des hommes politiques avec une audience et devenues aussi des experts par ailleurs. La deuxième séquence, qui va continuer, c’est la guerre qui oppose l’Ukraine à la Russie. Cette séquence est en train de créer de nouvelles figures et est en train de les installer durablement dans l’écran du spectacle", juge François Belley.
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