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"Certains journalistes étaient achetés par le STB", affirme Vincent Jauvert

Par Adélaïde Motte

Journalistes à la solde du STB : André Bercoff en parle avec Vincent Jauvert sur Sud Radio le 29 février 2024.

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Vincent Jauvert invité d’André Bercoff dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Vincent Jauvert, grand reporter, ancien chef du service étranger de L’Obs, auteur de A la solde de Moscou, éd. du Seuil, est l'invité de Bercoff dans le Face-à-face pour évoquer les espions français à la solde du STB, service d'espionnage tchèque à l'époque de l'URSS.

"La France était une cible majeure du bloc de l'Est"

Entre les années 50 et 70, "il y a deux médias dont certains journalistes étaient achetés par le STB, le Canard Enchaîné et le Nouvel observateur", explique Vincent Jauvert. On dispose par ce service d'un matériau "exceptionnel " car "on n'a jamais eu d'archives des services de renseignement au quotidien." Vincent Jauvert a consulté ces archives ouvertes à tous pour produire son livre, dans lequel il détaille l'histoire de plusieurs journalistes ayant travaillé pour le STB, c'est-à-dire les services de renseignement tchèques. Des "personnages flamboyants, extraordinaires. Pas forcément sympathiques. Les meilleurs sont ceux qui sont absolument insupportables."

En effet, "la France était une cible majeure du bloc de l'Est", notamment parce que "jusqu'en 66 c'était le siège de l'OTAN, un pays qui avait l'arme nucléaire, qui était militairement important, politiquement décisif." Le STB repère donc des journalistes par "une approche circulaire." "Ils tournent autour, ils se renseignent, ils vous invitent à déjeuner plusieurs fois, et puis petit à petit ils posent des questions précises, mine de rien ils notent tout, ils voient si vous êtes engageant, si vous répondez, et si vous avez des faiblesses : penchants idéologiques, si vous avez des relations sexuelles que vous ne voulez pas revendiquer... Ils s'écrivent entre eux, ils demandent d'abord à Moscou, on organise le déjeuner où on va avancer doucement vers la tentative de recrutement. On fixe, et quand on sent que ça mord on dit 'on va se voir toutes les six semaines et vous allez accepter des rendez-vous clandestins'."

"Aujourd'hui c'est le KGB qui est au pouvoir"

Les agents du STB ressemblaient à n'importe qui, mais étaient "extrêmement sympathiques. C'est le job premier. Regardez Poutine qui s'adapte à vous, c'est pour ça qu'il a eu tant de succès au début. Eux étaient pareils." Aujourd'hui "rien n'a changé, d'autant plus que du temps de l'Union soviétique le KGB était aux ordres, aujourd'hui c'est le KGB qui est au pouvoir." Cette situation est unique au monde, et crucial actuellement. "Vu la tension internationale d'aujourd'hui, connaître le niveau de préparation c'est crucial pour Poutine." "Ils ne savent faire que ça, ils le font bien semble-t-il, on a des histoires tous les jours dans le monde." Vincent Jauvert précise également que la tâche est plus facile pour le FSB que pour les services d'espionnage qui voudraient surveiller la Russie car "nos territoires sont largement plus perméables."

Si l'Occident recourt également à des espions, Vincent Jauvert estime que la situation est "sans commune mesure". "La CIA elle a beaucoup de pouvoir, parfois trop, ils sont allés beaucoup trop loin, mais ça s'est su." "Du temps de Georges Bush, il y avait une grande enquête publique sur la CIA, vous ne verrez pas ça à Moscou."

Jean Clémentin "a fait passer des articles dictés par le STB dans le Canard"

A la solde de Moscou relate l'histoire de plusieurs espions à la solde du STB. Citons ici Jean Clémentin. "Il était rédacteur en chef politique, puis il a été rédacteur en chef tout court. Au départ idéologiquement il était à droite et puis il est allé en Indochine, il s'est rapproché du Libération de l'époque, il a été recruté par le STB. Il a fait passer plusieurs fois des articles dictés par le STB dans le Canard, on voit dans les archives le brouillon en tchèque." Cela a duré "jusqu'au début des années 70, il a commencé au milieu des années 50. Il a pu payer sa maison comme ça."

Un autre agent était "l'espion parfait, la personne qui a accès à énormément d'informations et qui est invisible, il recevait tous les rapports de la DST. Il donnait tout, il les photographiait chez lui, il donnait les films à sa femme, à la sortie de la rame un tchèque prenait les films et glissait dans la poche de Madame les billets, ça a duré douze treize ans."

Cliquez ici pour écouter l’invité d’André Bercoff dans son intégralité en podcast.

Retrouvez “Le face à face” d’André Bercoff du lundi au jeudi  à 13h dans Bercoff dans tous ses états Sud Radio.

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