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Un médecin généraliste raconte son agression par l'un de ses patients

Par Jérémy Jeantet

Menaces de mort, menaces physiques... Un médecin généraliste de Seine-Saint-Denis raconte, au micro de Sud Radio, l'agression dont il a été victime, par l'un de ses patients, lundi matin.

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Son témoignage sur Twitter a beaucoup fait réagir. Joint par Sud Radio, Thomas, médecin généraliste en libéral en Seine-Saint-Denis, raconte l'agression dont il a été victime lundi matin, par l'un de ses patients, à son cabinet.

"J’étais dans ma suite de consultations du lundi matin quand un homme est arrivé, portant un enfant dans ses bras, a-t-il raconté. Il a commencé à crier dans la salle d’attente. Comme je venais de prendre des patients, je suis allé voir ce qui se passait. Il criait qu’il avait déjà cassé la gueule à un autre médecin, un de mes confrères sur la ville, qu’il allait me péter la gueule si je ne prenais pas son enfant tout de suite."

Finalement, face à la montée de la tension et, dit-il, par égard pour son étudiante externe qui assistait, pour apprendre, aux consultations, Thomas décide d'accéder à sa demande et d'ausculter l'enfant "dès que les consultations de la matinée étaient finies".

Si "l'enfant n'avait rien de particulier, tout ça s'est assorti, dans la conversation, de menaces de coups, de menaces de mort, de menaces de me retrouver si j'appelais la police." Ce que Thomas avait déjà fait au début de l'intrusion de l'individu, mais face à la peur des représailles, il a préféré annuler la venue de la police.

"Des situations tendues, avec des patients très véhéments, j'ai l'habitude d'en gérer. Là, on était vraiment un cap au-dessus, avec des menaces de mort, des menaces de coups qui étaient vraiment crédibles, et un rapprochement physique, a-t-il expliqué. J'ai eu peur, oui, comme toute personne qui est confrontée à de la violence. On n'est pas là, en tant que soignants, pour être violents nous-mêmes ni pour recevoir autant de violence, alors qu'on fait déjà beaucoup d'efforts pour nous dépêtrer de situations sociales difficiles, sans avoir beaucoup d'appuis."

Après cet incident, Thomas regrette à la fois une politique dans les quartiers où "tout est à revoir" et un sentiment d'abandon de la part des autorités médicales.

"On est confrontés à des gens qui sont en détresse sociale réelle, qui font tout pour s'en sortir, ce qui est, je trouve, tout l'intérêt de mon métier. Mais aussi à toute une frange de la population qui fait preuve d'incivilités. On a beau réexpliquer les choses, faire le plus de pédagogie possible, les comportements ne changent pas", a-t-il déploré.

"Avec l’immense majorité de mes patients, ça se passe bien, précise-t-il toutefois. Il ne faut stigmatiser et jeter la pierre à personne. Il y a beaucoup d’argent qui est mis pour la rénovation de ces quartiers là. Par contre, c’est certain qu’il y a des façons de redistribuer l’argent. Ce n’est pas normal que le CHU de proximité soit devant de telles difficultés financières, tout comme l’université Paris XIII qui est en Seine-Saint-Denis, parce que n’est pas pris en compte le caractère social défavorisé des territoires dans lesquels ils interviennent. Là-dessus, oui, il y a probablement de l’argent à redistribuer."

Une situation difficile qui n'est pas facilitée par les autorités médicales : "À un moment, la médecine libérale doit prendre sa part de responsabilité, mais quand les autorités de tutelle n’aident pas, voire vous freinent... Quand on est convoqués parce qu’on fait trop d’arrêts de travail, dès la première année où on s’installe en banlieue, ça ne donne pas envie de continuer à travailler. Quand on est dans ces quartiers et qu’en plus, on a des autorités de tutelle qui font tout pour nous dégoûter de notre travail plutôt que de nous encourager, c’est encore plus dur. C’est là que ça pose problème et que ça finit par décourager un peu tout le monde."

"J’avais déjà prévu de partir à l’étranger depuis quelques mois, le cabinet allait de toute façon fermer, mais là, c’est une petite goutte d’eau supplémentaire, qui fait déborder un vase qui débordait déjà", a conclu Thomas.

Propos recueillis par Juliette de Noyelle pour Sud Radio

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