Paul-François Paoli dénonce "une banalisation de la vulgarité"
"Au 19e siècle, des gens opposés idéologiquement, comme Marcel Proust et Charles Maurras, s’écrivaient, ils se parlaient. Aujourd’hui, ce que nous voyons, c’est une sorte de banalisation de la vulgarité, banalisation de l’insulte, banalisation de l’injure sur les réseaux sociaux. C’est une violence verbale qui se diffuse partout. Et en même temps, on nous rebat les oreilles avec une exhortation au vivre-ensemble", a déploré le journaliste Paul-François Paoli au micro d’André Bercoff.
Rappelons-nous la violence des pamphlétaires du 19e et du début du 20e siècle : Léon Bloy, Zo d’Axa… Il y avait une culture de violence rhétorique, mais ça n’avait rien à voir avec la violence des injures sur les réseaux sociaux aujourd’hui.
Une diffusion de la haine, les querelles intellectuelles en moins
Autre exemple : George Steiner, victime du nazisme, et Lucien Rebatet, idéologue du collaborationnisme radical, un national-socialiste. Rebatet était admiratif de la prose de Steiner, son livre Tolstoï ou Dostoïevski l’a particulièrement intéressé. Et ils se sont rencontrés et se sont parlé de littérature, malgré leurs divergences irréconciliables. Pour Paul-François Paoli, "cela montre à quel point le langage et la parole pouvaient rapprocher les hommes les plus opposés idéologiquement".
"Mais ce débat est aujourd’hui dépassé. Aujourd’hui on a une diffusion de la haine, sans les grandes querelles qui ont émaillé le 20e siècle", a estimé Paul-François Paoli. "Quand vous voyez la querelle entre Jean-Luc Mélenchon et Edwy Plenel, vous avez une illustration de la fraternité républicaine extraordinaire", a-t-il plaisanté au micro d’André Bercoff.
Pour Paul-François Paoli, les partis de gauche "ne représentent plus grand-chose"
Au cours de cet entretien avec André Bercoff, Paul-François Paoli est également revenu sur ce qu’il voit comme étant le déclin de la gauche. "La gauche a capitalisé un magistère extraordinaire depuis la Libération en 1945, et aujourd’hui elle a perdu ce magistère, et c’est une sorte de désert qui a pris la place. La droite, qui devait être une sorte de camp conservateur, n’a pas été capable d’offrir une alternative intellectuelle substantielle, consistante. Elle a opposé une fin de non-recevoir à tous les grands penseurs qui venaient de la gauche : c’est le magistère de Jean-Paul Sartre jusqu’en 1960, et depuis 1960 c’est le magistère de Michel Foucault", nous a raconté Paul-François Paoli.
"Aujourd’hui à gauche, il y a des chamailleries entre des partis qui ne représentent plus grand-chose. Il y a un désert intellectuel, il y a un pouvoir à prendre, et la droite est incapable de prendre ce pouvoir. Même quand il y a des gens brillants, on a l’impression qu’il y a une inhibition qui règne", a-t-il estimé.
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