André Bercoff a tenu à demander à Michèle Tribalat pourquoi l’immigration était un sujet aussi sensible en France. "Il existe une polarisation de la société française sur cette question. D’une part, il y a les gens qui vivent ce qu’ils vivent dans les quartiers où il y a beaucoup de personnes d’origine étrangère, qui se tiennent à l’écart pour préserver leur mode de vie. D’autre part, il y a une élite un petit peu hors sol qui essaie de faire la morale à ses « vilains Français » qui n’ont pas l’air de voir exactement la même chose. Il y a une incompréhension fondamentale entre ces deux catégories de la population", estime Michèle Tribalat.
Michèle Tribalat a aussi expliqué à André Bercoff pourquoi l’immigration faisait aussi peur. Selon elle, les personnes qui éprouvent cette peur sont porteurs de convictions erronées."Il y a des choses qui sont dites et qui plaisent beaucoup. Par exemple l’histoire des 200.000 entrées depuis une quinzaine d’années. Tout le monde va vous sortir ça. Et c’est pas vrai !", tempête Michèle Tribalat. Selon la démographe, cette statistique est faite à partir des titres de séjour qui sont délivrés, ces chiffres ne reflètent donc pas fidèlement le nombre d’installations permanentes. En même temps, certaines années, il se peut en effet que le nombre d’arrivées dépasse celui des titres de séjour délivrés, comme cela s’est probablement produit en 2015. "Dans ces statistiques vous n’avez pas les demandeurs d’asile, ils sont en procédure, ils ne sont pas répertoriés", explique Michèle Tribalat.
Une autre idée préconçue que Michèle Tribalat s’est attachée à défaire est celle selon laquelle les pays développés auraient besoin d’une arrivée massive d’immigrés pour faire face au vieillissement de la population, ce manque d’équilibre démographique entre les actifs et les inactifs qui creuse le déficit du système de retraites. Selon la démographe, cette idée prend racine dans un rapport produit par l’ONU au début des années 2000, et dont les conclusions avaient été mal comprises. "Les auteurs de ce rapport voulaient dire : 'Pour maintenir le rapport entre les inactifs et les actifs, faites autre chose, parce que l’immigration n’est pas la panacée'. Mais on l’a compris à l’envers", estime Michèle Tribalat.
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