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Dernier verre à Paris: soupe à la grimace dans les bars fermés, cahier de rappel dans les restos ouverts

Par Mathilde Choin & Clément Bargain (édité par Félix Mathieu)

Paiement à table privilégié, gel hydroalcoolique sur toutes les tables, réservation recommandée... Le protocole sanitaire renforcé pour les restaurateurs de Paris et de la petite couronne entre en vigueur ce mardi. Et si il y a bien une mesure qui revient à chaque dans la bouche des professionnels de la restauration et de leurs clients, c'est bien le fameux cahier de rappel.

Le "cahier de rappel" dans un restaurant. (Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
Reportage Sud Radio de Mathilde Choin

 

Ce cahier de contact, Lisa le connaît très bien. A Munich, où elle habite, il est déjà utilisé depuis plusieurs mois: "On doit toujours noter l'heure à laquelle on arrive, combien de temps on reste à peu près... Et on laisse nos données aux restaurateurs. Alors il y a des gens qui mentent, mais je pense que la plupart des gens sont assez sincères et comprennent l'intérêt, si ça permet aux restaurateurs de rester ouvert." C'est bien l'état d'esprit de Franck, restaurateur installé près du Centre Pompidou, qui y voit surtout un moyen de poursuivre son activité:

"Pas de problème! J'amène le cahier, un petit coup de gel, les gens le remplissent. Je tire un trait, date, heure... Je crois que tout le monde peut comprendre ça très bien !" - Franck, restaurateur

Grâce à ce carnet, les clients seront prévenus par l'Assurance maladie en cas de détection d'un cas de Covid dans l'établissement.

 

"On fait un peu la police, c'est pas notre métier"

Joris y est favorable pour lutter contre l'épidémie, mais cela va lui demander des aménagements dans son restaurant:

"Je pense faire patienter les clients beaucoup plus de temps à l'extérieur le temps que quelqu'un puisse se déplacer pour prendre leur nom et prénom. Le risque, c'est qu'ils aillent dans le restaurant d'en face. En terme d'organisation, ça va être une horreur..." - Joris, restaurateur

Et c'est sans compter la réaction de certains clients, que redoute Sofiane, installé depuis seulement deux mois: "On peut pas forcer le client à donner son nom et prénom, mais nous on est dans l'obligation de lui demander. Donc on fait un peu la police dans notre restaurant. C'est pas notre métier, sinon j'aurais fait flic !" La mesure aurait en tout cas permis d'éviter des clusters outre-Rhin, comme à Berlin où 70 personnes ont pu être testés après un cas dans un bistrot cet été.

 

Fermeture d'un bar à Paris ce lundi soir. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

 

"Je ne veux pas être en bagarre avec tout le monde"

Paiement à table privilégié, gel hydroalcoolique sur toutes les tables, réservation recommandée ou encore cahier de contacts... Que de bonnes mesures pour Franck, restaurateur dans le centre de Paris, mais à condition d'en connaître TOUS les tenants et les aboutissants:

"Je veux que les choses soient très claires. Si on peut servir faire restaurant le soir, d'accord. Qu'est-ce qu'on va faire de la table avec deux personnes qui mangent, et quatre qui les rejoignent pour prendre une bière?" - Franck, restaurateur

 

Parisiens privés de bars, barmen privés de recettes

Alors qu'ils sembleraient pouvoir rouvrir sous conditions à Marseille, les bars ont totalement fermé à Paris. Vus comme de possibles clusters, ils sont ciblés en priorité par l’exécutif, ce qui est difficile à admettre pour les professionnels du secteur, mais aussi par les consommateurs. Certains ont bu un dernier verre lundi soir, avant que ces débits de boisson ne ferment le rideau.
Reportage Sud Radio de Clément Bargain

 

Assis en terrasse, Julien trinque une dernière fois avec ses amis: "On en profite... ça sera un plaisir en moins, mais on fera des économies !" S'il prend ça avec humour, son amie Alexandra a bien du mal à accepter la fermeture des bars: "On est confinés sans être confinés. On bosse, mais on ne peut pas se faire de plaisir, aller voir nos amis après le boulot, juste parce-que le gouvernement ne veut pas. Pourtant, dans les entreprises, tout le monde est assis côte à côte !".

 

"Je paye mes factures, j'ai plus d'argent à la fin du mois !"

Sébastien aussi est amer. Ce gérant d’un bar est persuadé que la fermeture n’est pas la solution. Et d'ironiser sur les consignes:

"Mettez votre masque quand vous-vous déplacez, ne dansez pas, ne bougez pas. Dans ce cas, les gens vont se dire: on va louer des Airbnb, ou rester chez nous à faire la fête ! Les gens trouveront toujours des moyens de contourner les choses"

D’autant que les professionnels du secteur se retrouvent dans une situation délicate… C’est le cas de Charles, responsable d’un établissement: "On sera au chômage technique, on sera payés mais on perd quand-même de l'argent, plus de 15%. Parce-que c'est 84% de notre salaire net qui est remboursé, mais sur 35h... Moi, je suis à 39h donc je perds encore plus d'argent . Moi, dés je paye toutes mes factures, j'ai plus d'argent à la fin du mois !" À 22 heures, les grilles se sont baissées avec beaucoup d’inquiétudes. Tous espèrent que la fermeture des bars ne sera pas prolongée au-delà de deux semaines.

 

"C'est difficile de s'organiser à la dernière minute, vider toutes les réserves"

Des restrictions difficiles à admettre pour les professionnels du secteur un peu pris de court, et qui doivent gérer la fermeture avec beaucoup d’inquiétudes… Sébastien est le gérant d’un bar dans le centre de la capitale:

"Il va y avoir beaucoup de pertes. Comme le 14 mars dernier, on s'est retrouvé avec toute la cargaison à jeter, car il y a des dates de péremption, sur les jus, sur plein de choses. On souffre vraiment, et pas que les barmen et serveurs. Il y a aussi l'homme de ménage, le chef de sécurité, les portiers, les fournisseurs qui se retrouvent sans commande... C'est compliqué !" - Sébastien, gérant

(GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

 

 

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