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Contre les drones, la marine répond brouillage et "mur d'acier"

Le canon de 76 mm crache trois obus vers le ciel, faisant vibrer le plancher de la passerelle. "UAV détruit", lance, les yeux vissés à ses jumelles, un marin de la frégate Lorraine qui s'entraîne à la lutte antidrones et teste de nouveaux équipements.

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

Le canon de 76 mm crache trois obus vers le ciel, faisant vibrer le plancher de la passerelle. "UAV détruit", lance, les yeux vissés à ses jumelles, un marin de la frégate Lorraine qui s'entraîne à la lutte antidrones et teste de nouveaux équipements.

Quelques instants plus tôt, c'était une cible représentant un drone de surface qui s'enfonçait lentement dans les flots de Méditerranée, criblée de balles de mitrailleuse 12,7 mm. "Tu lui as mis tempête, Tristan !", lancent les marins au jeune matelot de 20 ans pour son carton à 300 mètres.

Tirs contre drones de surface ou aériens, arrivant seuls ou en groupes, exercices de guerre électronique contre des avions figurant des drones ou missiles... Pendant cinq jours, cinq navires de la marine française ont conduit l'exercice Wildfire de lutte antidrones.

Des marins de la frégate française "Lorraine" lors d'un exercice de tirs antidrones le 2 octobre 2025 en mer Méditerranée

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

"On adapte nos modes d'actions et nos équipements par l'innovation", explique le pacha, le capitaine de vaisseau Laurent Toncelli.

Face à cette menace qui révolutionne tous les champs de la guerre, de l'Ukraine à la mer Rouge en passant par les opérations hybrides dans le ciel européen, la marine veut se moderniser au plus vite.

"Mieux vaut une réponse au besoin partielle mais rapide, qu'une réponse complète qui va arriver trop tard, voire si tard qu'elle sera obsolète", souligne l'ingénieur général de l'armement Frédéric Petit, conseiller innovation auprès de l'état-major marine, présent à bord.

- "Mieux voir la menace" -

Les nouveautés testées sur la Lorraine sont nichées dans un container aux couleurs de Naval Group installé à l'arrière, sur la plateforme hélicoptère, et hérissé d'antennes, radars et optiques, qu'il est interdit de photographier et de visiter. Une poignée d'industriels et des membres de la Direction générale de l'armement vont et viennent autour.

Une cible représentant un drone de surface se fait détruire par les tirs de la frégate française "Lorraine" lors d'un exercice en Mer Méditerranée le 2 octobre 2025

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

Avec ce matériel, "on explore la capacité de brouillage, on augmente la létalité de nos armes, notamment de petit calibre, et on intègre de l'optronique supplémentaire pour mieux voir la menace", résume le capitaine de vaisseau.

Les marins testent par exemple un nouveau système d'assistance au tir sur les deux canons de 20 mm Narwahl, téléopérés depuis la passerelle, qui répère plus vite et suit mieux les cibles. Quand le canon fonctionne, car il a connu plusieurs incidents de tir pendant que l'AFP était à bord.

Un écran affiche un drone hostile abattu depuis la frégate de la Marine française "La Lorraine", naviguant en mer Méditerranée, le 2 octobre 2025, lors de l'exercice Wildfire 2025, dédié à la lutte anti-drones

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

Sur l'écran, des cases flanquées d'un chiffre apparaissent. "C'est le pourcentage auquel le système est sûr que c'est une cible", explique le second maître Baptiste, 21 ans, casque sur les oreilles pour écouter les ordres et consignes, et talkie-walkie a la main pour échanger en direct avec les industriels dans leur container. "Là, sur mes tirs, j'étais au-dessus, je leur ai dit".

- "Un coup de plein phares" -

Un marin français tient un pointeur infrarouge pour désigner des cibles d'urgence, tout en recherchant des drones hostiles, à bord de la frégate française "La Lorraine" naviguant en mer Méditerranée, le 2 octobre 2025, lors de l'exercice Wildfire 2025, dédié à la lutte anti-drones

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

Pour abattre les drones, "il y a deux moyens: à l'ancienne, comme à Pearl Harbor, qui consomme du monde et des munitions, et celui où on cherche finement dans la technique, parce qu'on veut que la première balle arrive dedans", explique le lieutenant de vaisseau François, 36 ans, responsable de l'artillerie, depuis le "central opération", le centre névralgique de la frégate.

Des marins français opèrent la console contrôlant le canon de 76mm depuis la salle d'opérations centrale à bord de La Lorraine, une frégate multi-mission de la Marine française, naviguant en mer Méditerranée, le 2 octobre 2025, lors de l'exercice Wildfire 2025 dédié à la lutte contre les drones

Des marins français opèrent la console contrôlant le canon de 76mm depuis la salle d'opérations centrale à bord de La Lorraine, une frégate multi-mission de la Marine française, naviguant en mer Méditerranée, le 2 octobre 2025, lors de l'exercice Wildfire 2025 dédié à la lutte contre les drones

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

La marine conjugue les deux approches: en plus d'accroître la précision, "on est en train de densifier notre capacité à dresser un mur d'acier. Depuis 2025, on a installé des mitrailleuses supplémentaires sur l'arrière de la frégate, et pendant cet exercice, on a testé des mitrailleuses bitubes encore plus performantes avec plus de munitions, une cadence plus élevée et de meilleures aides à la visée ", explique-t-il.

Outre cet accent mis sur la destruction à courte portée des drones, "la guerre électronique et le brouillage sont de bons moyens" pour les neutraliser plus loin, sans devoir tirer les très coûteux missiles Aster lovés dans la proue, explique l'ingénieur général de l'armement.

Le brouillage permet théoriquement de neutraliser plusieurs cibles en même temps, comme un essaim de drones.

Le canon de 76 mm en action sur la frégate polyvalente de la Marine française "La Lorraine" naviguant en mer Méditerranée, le 2 octobre 2025, lors de l'exercice Wildfire 2025 consacré à la lutte contre les drones

CLEMENT MAHOUDEAU - AFP

"Le canon vise une cible seulement, nous on vise une zone", explique le second maître Kevin, opérateur de guerre électronique de 33 ans. "C'est comme un coup de plein phare dans les yeux en pleine nuit: vous êtes aveuglés, c'est pareil pour le drone".

Par Fabien ZAMORA / Toulon (AFP) / © 2025 AFP

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