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Pour les banlieues, il faut employer les grands moyens, et pas seulement financiers

Emmanuel Macron a présenté son plan pour les banlieues. Comme tous les gouvernements depuis 40 ans, alors que les problèmes demeurent et s'aggravent.

 

Pour se débarrasser de l’étiquette de président des riches, Emmanuel Macron a énoncé les axes de sa politique pour les banlieues. Le terme de banlieue est consacré par l’usage mais il est inapproprié car il ne désigne que les quartiers difficiles et que, dans la politique de la ville, on nommait autrefois zones urbaines sensibles, qui sont devenus quartiers prioritaires, dans le grand mouvement qui refuse de nommer les choses, comme si ne plus dire que ça va mal suffisait à ce que ça aille mieux.

À l’heure actuelle, on recense 8 millions d’habitants dans 1300 quartiers prioritaires. Les noms changent mais les problèmes demeurent et s’aggravent. Macron a donc lancé un plan banlieue, comme tous les gouvernements depuis 40 ans.

On a essayé beaucoup de choses. Les premières réhabilitations de HLM datent de Raymond Barre en 1977. Les ZEP en 1981. La politique de la ville avec son ministre dédié sous Rocard en 1988. Les contrats villes de Balladur en 1994. Les zones franches urbaines et les ZUS de 1996. L’ANRU de 2004. Les contrats urbains de cohésion sociale de 2006.

Avec la création de l’ANRU, imaginée par Borloo, on a beaucoup dépensé pour la réhabilitation de l’habitat et c’était nécessaire. On a abattu des tours, coupé des barres, corrigé un peu de ce que ces grands ensembles des années 1960-1970 avaient d’invivable et de mauvaise qualité du bâti. À juste titre, Sarkozy avait dit ‘on s’est occupé des immeubles, maintenant, il faut s’occuper des gens’.

Mais 12 ans après les émeutes urbaines, on a toujours des quartiers qui ressemblent à des ghettos, où, souvent, la situation économique, sociale, éducative, sécuritaire, a empiré.

Macron a raison de dire que toutes les politiques publiques, pas seulement celle de la ville, doivent concourir à la résorption de ces poches de pauvreté, d’insécurité et, de plus en plus, de communautarisme.

Vu la dégradation de la situation, il faut employer les grands moyens qui ne sont pas seulement financiers. D’abord, peut-être, comme l’a suggéré Malek Boutih il y a quelques années, mettre certains quartiers sous la tutelle de l’État. Profiter aussi des lois contre le terrorisme pour éradiquer les trafics d’armes et de drogue qui se nourrissent l’un l’autre.

Pour combattre les phénomènes de bande, refaire une nouvelle législation, dans l’esprit de la loi anti-casseur de Pompidou et Chaban, abrogée en 1981.

Pour rétablir l’autorité, alourdir considérablement les peines pour toute agression contre les dépositaires de cette autorité.

Retirer l’autorité parentale aux parents qui frappent des enseignants, comme à ceux qui n’envoient pas leurs enfants à l’école.

Modifier les lois sur l’école pour imposer à tous les types d’écoles, publiques, sous contrat ou hors-contrat, des obligations, des interdits, dont le non-respect pourrait entraîner la fermeture administrative de l’établissement.

Envoyer les élèves violents, ceux qui empêchent les autres d’étudier, dans des centres d’éducation fermés. Et pourquoi pas fermer progressivement les écoles, en commençant par le cours préparatoire, dans des quartiers qui cumulent tellement de handicaps que la réussite scolaire y est exclu par avance et répartir les élèves dans d’autres écoles.

Enfin, engager le retour à l’assimilation républicaine et à l’élitisme républicain qui, seul, peut donner sa chance à l’enfant d’un milieu social très défavorisé. Élitisme républicain dont les internats d’excellence, qu’il est urgent de rétablir, avait vocation à être l’un des instruments. Il faut multiplier aussi, parce qu’il ne faut laisser personne de côté, les écoles de la deuxième chance, qui marchent très bien mais qui sont trop peu nombreuses, et en abaisser l’âge à 16 ans.

Il faut par tous les moyens sortir de l’enfermement ceux qui sont pris au piège des cités dès l’enfance et abandonner la méthode du zonage, qui cloisonne l’espace urbain et trace de véritables frontières à l’intérieur de la ville, comme de la société.

C’était l’ambition initiale du projet du Grand Paris, on a préféré, hélas, faire une institution de plus plutôt que de décloisonner la ville.

Il y a aussi la nécessité d’éviter tout recours à la discrimination positive qui trace des frontières invisibles dans les têtes et qui oppose les uns aux autres. La liste n’est pas exhaustive, on pourrait aussi parler de l’immigration ou de la politique économique.

Ce matin, François Pupponi, ancien maire PS de Sarcelles, lance un appel angoissé à propos de la mainmise des associations salafistes qui prennent la place des services publics et sociaux défaillants, en particulier l’école. C’était la stratégie des Frères Musulmans en Égypte avant la révolution. Il faut là aussi adapter nos lois à cette situation particulière et à ces menaces nouvelles.

Tout cela représente un immense chantier, d’autant plus que, dans le même temps, il faut reconquérir l’espace rural car opposer l’urbain et le rural serait suicidaire pour la cohésion nationale.

Écoutez la chronique d'Henri Guaino dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard

 

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