Comme d'habitude, le président a manié le verbe et il l'a fait avec intelligence. Hélas, on sentait les ficelles, le besoin de déconstruire l'image de président des riches, la réponse aux critiques habituelles sur l'absence de baisse des dépenses, sur l'incapacité à écouter l'opposition, et même la réponse à ce sondage publié il y a quelques jours et dans lequel les Français, à 84 %, jugé que le président n'était pas humble. « Si on est réaliste, on porte l'humilité, ô combien, mais l'humilité pour soi, pas pour la France. » C'est très bien dit, mais ça ne suffira pas.
Il nous démontre surtout que la rhétorique macronienne a ses limites. On retrouvait tous les termes fétiches, tous les marqueurs : le combat contre les rentes et les privilèges, l'émancipation à opposer aux inégalités de destin. Et de fait, la destruction de toute ascenseur social, l'assignation à résidence sociale fait crever la France. Mais une fois de plus, c'est à l'individu qu'on s'adresse, c’est à lui de se retrousser les manches. C’est à lui d’être mobile, moderne, en marche, et malheur aux vaincus. Mais sont-ce les protections et régulation rebaptisées rentes et privilèges qui provoquent cela ou bien les nouveaux privilèges d'une classe sociale qui profite de la mondialisation et de la dérégulation? L’Etat providence du XXIème siècle reste à inventer. Emmanuel Macron ne serait pas président des riches mais des entreprises ? Il aura du mal à en convaincre les petits patrons et les petits artisans qui ont bien compris que leur entreprises, elle, n’intéressait personne.
Ce discours n'avait rien de nouveau, il se contentait de reprendre la même musique qui sonne désormais faux. Avec en toile de fond l'opposition facile entre progressistes et nationalistes pour éviter de parler de cette souveraineté que décidément Emmanuel Macron n'arrive pas à rendre au peuple, tout simplement parce qu’il a choisi de la sacrifier à un système qui la piétine. Pas un mot pour nous expliquer comment il comptait faire avancer sa vision d’une Europe qui protège. Les Italiens, avec le bras de fer autour de l’Aquarius, ont plus fait pour l’Europe que tout le lyrisme macronien. Pas un mot pour nous dire comment il comptait lutter contre un impérialisme américain à la fois géopolitique, culturel et commercial, que ses embrassades avec Trump n’ont pas modifié d’un iota. Le même discours que l’an dernier, après un an de déconvenues.
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