On est aujourd’hui tenté de se dire que le travail au noir est de plus en plus risqué, suite aux contrôles qui se renforcent d'années en années. La preuve : en 2007, l’Urssaf avait détecté et verbalisé pour un montant de 59 millions d’euros de travail dissimulé. Dix ans plus tard, en 2017, le montant atteint la somme astronomique de... 541 millions d’euros, un demi-milliard ! Conclusion logique, si les sommes en jeu ont légèrement diminué l’an dernier (2,3%), c’est parce que les employeurs ont pris peur et jouent moins avec le feu.
Seulement voila, la réalité est toute autre ! En effet, ce n’est pas parce que les employeurs fraudent moins que les redressements baissent, c’est surtout parce que les fraudes deviennent plus habiles, plus complexes à détecter, plus délicates à verbaliser... Résultat, le temps nécessaire à un inspecteur de l’Urssaf pour boucler un dossier s’allonge, et il peut désormais dépasser une année civile.
Vous me direz que l’Urssaf peut malgré tout compter sur des recettes supplémentaires, avec plus de 500 millions d’euros de cotisations et d’amendes. Sauf que ça, c’est ce que l’Urssaf devrait toucher en théorie, sur le papier. En réalité, quand ses inspecteurs décèlent une fraude massive et redressent une entreprise, il est souvent déjà trop tard. Le redressement ou la liquidation judiciaire ne sont pas loin, quand ils ne précédent pas le contrôle... Résultat, sur les quelque 550 millions d’euros d’impayés et d’amendes sur 2017, l’Urssaf n’a récupéré que 10% de l’ensemble, à peine 60 millions !
À l’Urssaf, on justifie l’intérêt des contrôles, non pas du fait des sommes récupérées – minimes, on l’a vu – mais surtout par les vertus d’exemple que les contrôles provoquent. Quand une entreprise se fait contrôler ET redresser, en général, les entreprises du même secteur d’activité en sont informées et ont tendance à faire le ménage et redevenir vertueuses. Au moins quelques temps, par peur du gendarme…
Réécoutez en podcast l’édito de Jean-Baptiste Giraud dans le Grand Matin Sud Radio