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Jean-Yves le Naour : "La raison d'être de la peine de mort, c'est l'exemple"

Jean-Yves Le Naour, historien et auteur du livre “Histoire de l’abolition de la peine de mort”, était l’invité d’André Bercoff le 10 septembre 2021 sur Sud Radio dans son rendez-vous du 12h-13h, “Bercoff dans tous ses états”.

Jean-Yves Le Naour invité d’André Bercoff dans “Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Jean-Yves le Naour : "La peine de mort est un sacrifice religieux"

Jean-Yves le Naour explique que "la peine de mort existe depuis l’antiquité et peut-être au-delà". "Je vais parler en tant qu’historien", explique-t-il, "à partir du moment où l’on a des sources. Par exemple, au Louvre, nous disposons du code d'Hammurabi, un des premiers codes de justice qui date du 2ème millénaire avant JC". Dans le code d'Hammurabi "la peine de mort est presque omniprésente. Dans l’antiquité, il y a deux peines : le bannissement de la cité, qui est une forme de mort, et la peine de mort". "La peine de mort est un sacrifice religieux", explique l’historien "Le criminel a violé la loi des dieux et son sang versé permettra de restaurer l’ordre. Car l’ordre des dieux et l’ordre social c’est la même chose".

En France, au moyen-âge, "il y a 115 cas où l'on applique la peine de mort avant la révolution française", explique Jean-Yves le Naour, "Pour les manants, le tout-venant, c’est la pendaison. Pour les nobles, c’est la décapitation. Pour les régicides, c’est l'écartèlement. c’est la peine absolue, la plus violente, on vous attache à des chevaux, mais avant on vous entaille, on vous met du plomb fondu dans la bouche, dans les oreilles, etc.", ajoute l'historien.

 

"on est acquitté ou on est condamné, quand on est condamné, c’est à la peine de mort"

"On vous torture avant de vous exécuter", raconte l’historien. Pour lui, il s’agit d’une "dimension religieuse, il faut laver l’âme du coupable. C’est la souffrance nécessaire avant le châtiment". Selon l’auteur de l’Histoire de la peine de mort, "les modes d’exécution ne dépendaient pas de la gravité du crime. Quand on est emprisonné, c’est dans l’attente d’un jugement, on est acquitté ou on est condamné, quand on est condamné, c’est à la peine de mort", explique-t-il. Par exemple, "un domestique qui a volé un mouchoir ou une cuillère à son maître est condamné à la peine de mort, quelqu’un qui a coupé un chêne dans la forêt qui appartient au roi, est condamné à la peine de mort, un homosexuel est condamné à la peine de mort. Quelqu’un qui a blasphémé contre l’Eglise, un libre penseur est condamné à la peine de mort, alors lui, il est brûlé, il n’est pas écartelé ni pendu. Il faut purifier par les flammes" énumère Jean-Yves le Naour.

"La gradation des peines arrivera avec la révolution française", déclare Jean-Yves le Naour au micro d’André Bercoff. "Les révolutionnaires sont les enfants des lumières. Ils ont débattu en 1791 pour savoir s’ils gardaient ou non la peine de mort", explique-t-il. "Ils ont décidé de la garder. Comme ce sont des enfants de la raison, ils ont décidé que ce serait la même peine pour tous, ils ont choisi un mode de décapitation qui soit le plus rapide possible, comme le disait le docteur Guillotin : ‘faire passer de vie à trépas en un clin d'œil, et qu’on ne sente rien’". Jean-Yves le Naour explique que "la question préalable, la torture avant l’exécution a été supprimée. On ne torture plus avant l’exécution, on exécute et c’est tout".

 

"La raison d'être de la peine de mort, c'est l'exemple"

"La première fois qu’on exécute" après la révolution française, explique l’historien, "c’est en avril 1792, c’est un voleur. La foule est déçue parce qu'on lui a enlevé son spectacle. En une seconde, on est passé de vie à trépas". Pour Jean-Yves le Naour, "la raison d’être de la peine de mort c’est l’exemple. On tue pour apprendre aux autres à ne pas tuer". Progressivement "on s’est aperçu que ça ne fonctionnait pas", juge l’historien. "On a commencé a avoir honte à partir de 1832, on guillotine à l'aube et plus en plein jour, comme sous la révolution". Puis "on a supprimé l’échafaud en 1870", ajoute-t-il. "A partir de 1909, on a interdit les photos, on a interdit les films et enfin, la dernière exécution publique a eu lieu en juin 1939", explique l’historien.

 

Pour Jean-Yves le Naour, "la peine de mort relève d’une justice absolue accompagnant un pouvoir absolu". "Un roi absolu a besoin d’une justice absolue, il a donc besoin de la peine de mort", explique t-il. Jean-Yves le Naour remarque que "quand on regarde la carte du monde, toutes les dictatures, tous les régimes totalitaires, tous les régimes autoritaires ont recours à la peine de mort. ça c’est une condition sine qua non, un régime absolutiste a une justice absolue", juge-t-il.

 

Cliquez ici pour écouter l’invité d’André Bercoff dans son intégralité en podcast.

 

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