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Boom du streaming : le cynisme du SNEP

Par Jérémy Jeantet

Le syndicat national de l'édition phonographique a publié ce mardi son rapport annuel sur le marché de la musique enregistrée. Tout heureux d'annoncer un marché en progression, grâce à l'explosion du streaming, le syndicat n'évoque que très rapidement le "décalage entre les revenus que certains tirent de la musique numérique", partage dans lequel les artistes sont profondément lésés.

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C'est la fête pour la musique. Pour la première fois depuis 15 ans, le marché de la musique enregistrée connaît une hausse significative, + 5,4 % en 2016.

C'est ce qu'annonce, plein de joie, le syndicat national de l'édition phonographique (Snep), dans son rapport annuel. Ce marché a représenté en France, l'an dernier, 450 millions d'euros, contre 426 millions en 2015.

Une évolution positive qui marquerait, selon le syndicat, le début de la fin de l'éternelle crise du marché de la musique. Si les chiffres repassent dans le vert, c'est avant tout grâce à la hausse de la musique numérique, dont les ventes progressent de 19,5 % alors que les ventes de disques baissent de 2,5 %.

Une rémunération profondément inéquitable des revenus du streaming

Un grand merci au streaming, donc, dont la croissance "permet de compenser à elle seule la baisse des autres segments du marché", se félicite le Snep.

Pour autant, tout n'est pas tout blanc au royaume du disque. Parce que le streaming ne permet pas d'assurer une rémunération suffisante pour l'ensemble des acteurs. Pire, cette rémunération est loin d'être équitable.

Au détour d'une ligne dans un rapport de 25 pages, le Snep évoque "ce profond décalage entre les revenus que certains tirent de la musique numérique et ceux, très faibles, perçus par les ayants droits en retour".

Scandale, les différents acteurs du marché de la musique seraient lésés, notamment par les plateformes de streaming, qui s'en mettraient plein les poches, profitant à fond de l'explosion du marché.

Ce que le Snep omet toutefois de mentionner, c'est qu'une fois ponctionnée la part dévolue aux plateformes, la répartition du reste entre producteurs et artistes est, elle aussi, sujette à controverse. L'Adami, syndicat d'artistes-interprètes, milite d'ailleurs pour une meilleure répartition.

Une écoute en streaming gratuit rapporte 0,0001 euro à un artiste

Concrètement, les plateformes d'écoute streaming garderaient près de 70 % des revenus générés et reversent 30 % aux ayants-droits. Parmi ces 30 %, la répartition est actuellement de 95 % pour les producteurs et 5 % pour les artistes, dénonce l'Adami.

Ainsi, quand le Snep dénonce un "profond décalage", pointant les plateformes d'écoute streaming, elle garde sous silence le rapt des producteurs sur ces revenus. Au point qu'aujourd'hui, d'après les chiffres de l'Adami, un artiste ne touche que 0,0001 euro pour une écoute en streaming gratuit et 0,004 euro pour une écoute en streaming payant...

Depuis plusieurs années, les artistes-interprètes réclament un rééquilibrage. À titre d'exemple, le partage pour les diffusions radios est de 50/50 avec les producteurs. Des propositions qui font bondir le Snep et la SCPP (syndicat de producteurs comportant les trois majors, qui affiche déjà une vision très personnelle de la notion de 'jeune talent'), qui estiment certainement que le ratio 95/5 est tout à fait équitable.

"L’Adami n’entrera certainement pas dans le 21e siècle en s’appuyant sur un déni de la réalité de l’économie de la production phonographique en France et en proposant des mesures datant du début du siècle précédent", écrivaient-ils en 2014. Pour les artistes, le 21e siècle s'annonce donc précaire...

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