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Jean-Baptiste Rivoire : "Il y a de moins en moins de journalisme de terrain"

Jean-Baptiste Rivoire, journaliste d’investigation et co-fondateur du média "Off Investigation", membre de la Guilde des auteurs et réalisateurs de reportages, était l'invité de "Bercoff dans tous ses états".

Jean-Baptiste Rivoire
Jean-Baptiste Rivoire, invité d’André Bercoff dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Jean-Baptiste Rivoire est auteur du livre L'Élysée (et les oligarques) contre l'info (Éditions Les Liens qui Libèrent).

 

Jean-Baptiste Rivoire : "De nombreux journalistes de qualité sont obligés de sortir du système"

Pourquoi y a-t-il un désamour entre le public et les journalistes ? "Le phénomène n’est pas nouveau. Vous avez en France 5-6 industriels dont le métier n’est pas de faire de la presse (contrairement à ce qui se passe en Allemagne), qui contrôlent 95% des marques d’information privées. Quand des gens qui ont beaucoup de moyens prennent le contrôle de titres dont la crédibilité a été construite pendant des années grâce à des journalistes qui font du super boulot, pour exercer une influence soit sur l’opinion, soit carrément pour défendre leur business, ça finit par abîmer la crédibilité de ces marques-là. Il arrive un moment où le lecteur se demande : 'qui me parle ? C’est l’industriel qui défend son business ou c’est quelqu’un qui est honnête et qui donne de vraies infos ?'.

La première raison pour laquelle ils contrôlent ces rédactions, c’est d’empêcher les journalistes de nuire. Ils se disent : pour des reportages de terrain, il faut payer les billets d’avion et les hôtels aux journalistes, donc ça coûte cher. Il y a donc de moins en moins de terrain. On va prendre plus de journalistes de plateau, de chroniqueurs. Et puis, une autre chose qui est vachement coupée ces derniers temps, c’est l’investigation. Oui, ça coûte cher, mais c’est le métier. Or, le terrain et l’investigation, c’est les premières choses qui vont souffrir avec ces industriels, dont le but n’est pas de faire de l’information de qualité, sinon ça se saurait. Pour cette raison, de nombreux journalistes de qualité sont obligés de sortir du système. J’ai quitté Canal quand Bolloré est arrivé. On est bien payés par ces oligarques certes, quand je travaillais à Canal j’étais correctement rémunéré. Quand on sort, ça fait beaucoup plus froid. Comment on finance l’info, c’est une vraie question", a déclaré Jean-Baptiste Rivoire.

 

"L’objectif des industriels qui contrôlent la presse n’est pas de faire la bonne information"

Est-il arrivé à Jean-Baptiste Rivoire d’omettre de dire certaines choses parce que son rédacteur en chef le lui aurait demandé ? "C’est insupportable. On a tous à certains moments fait ce genre de compromis. À un moment la population s’en aperçoit, et c’est un piège mortel. Juste avant que les émeutes pètent en 2005, on avait appris un peu avant que ça chauffait. Donc on y va, on ne sait pas trop ce qui se passe, on voit des voitures de la BAC qui font du safari dans le quartier, qui tirent des flashballs sur des gamins qui s’enfuient au bas des immeubles. À l’époque je demande l’autorisation à Canal pour y aller, mais je veux être du côté des flics. Et je demande à un copain d’aller du côté des émeutiers. Pendant quatre jours, on y est avec deux caméras. Je peux vous dire qu’on avait deux points de vue assez différents mais assez intéressants."

Selon Jean-Baptiste Rivoire, l’objectif véritable de ces industriels qui contrôlent la presse est de pouvoir être reçus à l’Élysée en trois jours. "On fait tout comme si le but des industriels qui contrôlent la presse était de faire la bonne information. Moi, je ne suis pas d’accord que leur objectif soit de faire de la bonne information. Sinon on enverrait des gens sur le terrain et on ferait de l’investigation. Quand vous êtes industriel du bâtiment, quand vous vendez des armes, quand vous faites tout à fait autre chose que la presse, en France, si vous voulez avoir un président qui vous aide et qui ne vous met pas les bâtons dans les roues, il faut avoir de l’influence", a poursuivi Jean-Baptiste Rivoire.

 

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Retrouvez “Le face à face” d’André Bercoff chaque jour à 12h30 dans "Bercoff dans tous ses états" Sud Radio.

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