Secret et moins expansif que son frère jumeau Adam, le vétéran britannique Simon Yates a su surmonter une série de déceptions pour atteindre "le pic" de sa carrière dimanche avec sa victoire dans le Tour d'Italie.
S'ils ne portaient pas un maillot différent, il serait difficile de distinguer les deux frères. "Ils pourraient se substituer l'un à l'autre dans la nuit, sans qu'on s'en aperçoive" tellement il se ressemblent physiquement, en rigole le coureur néerlandais Tom Dumoulin aujourd'hui retraité.
Dimanche, les deux frères, nés à quelques minutes d'intervalle (Simon est l'aîné) il y à 32 ans à Bury dans la banlieue de Manchester, ont pris la pose ensemble au début de la 21e et dernière étape du Giro à Rome pour marquer le coup.
"Je suis content pour lui, c'est mon frère, il a fait du bon boulot. On va fêter ça ensemble ce soir", a souligné Adam, un des leaders de l'équipe UAE alors que Simon court pour la formation Visma-Lease a bike.
Les frères Yates ont commencé le cyclisme par la piste, au vélodrome de Manchester, à l'initiative de leur père John, un ancien coureur.

Le Britannique Simon Yates, vainqueur du Giro, dans les rues de Rome, le 1er juin 2025
Luca Bettini - AFP
Ils ont fait leurs débuts professionnels dans la même formation australienne Orica qui a changé de nom plusieurs fois avant de devenir aujourd'hui Jayco-AlUla.
Mais leurs chemins se sont séparés lorsque Adam a rejoint Ineos, puis UAE, alors que Simon est resté fidèle à la même équipe jusqu'à l'hiver dernier où il a rejoint Visma, soulagé de ne plus être le seul leader.
Personnage discret, Simon Yates est un pur grimpeur (1,72 m, 58 kg, un centimètre de moins que son frère) qui préfère s'exprimer sur son vélo que parler. D'autant qu'il a été vite refroidi après l'une de ces rares sorties tapageuses lorsque, avant le Giro 2019, il avait annoncé qu'à "la place des autres favoris je me ferais dessus", seulement pour finir à une décevante huitième place.
- Blessure originelle -
Le Britannique était alors en pleine euphorie après sa victoire dans la Vuelta l'automne précédent. Il ne se doutait pas qu'il lui faudrait attendre sept ans avant de décrocher son deuxième grand Tour.
Entre les deux, il a obtenu quelques résultats probants (3e du Giro en 2021, 4e du Tour de France en 2024) mais surtout subi un grand nombre de déconvenues (chutes, blessures,...) qui l'ont souvent découragé mais au final endurci.
Juste avant d'aborder ce Giro, il était une nouvelle fois dans le doute après avoir été renversé par une voiture lors d'un stage d'altitude à Tenerife.
Pendant tout ce temps, il ruminait aussi une blessure originelle, la perte du maillot rose lors du Giro 2018 lors d'une défaillance spectaculaire dans le colle delle Finistre.
La rédemption n'en a été que plus belle samedi lorsqu'il a retourné le Giro dans ce même col, lors d'une 20e étape dont il "parlait dès cet hiver", comme le rapporte son directeur sportif Marc Reef.
"Ca l'a rongé pendant des années, confie Adam. Depuis, il est revenu plusieurs fois sur le Giro mais en vain, enfin il y arrive" pour une revanche qui a fini par percer l'armure de ce coureur si peu démonstratif.
"Je ne suis pas quelqu'un d'émotif mais là je n'arrive pas à retenir mes larmes. Il faut savoir que j'ai travaillé toute ma carrière pour ça", a expliqué Simon Yates dont la persévérance a fini par payer.
AFP / Rome (AFP) / © 2025 AFP