Le Racing Club de Lens a acheté le célèbre Stade Bollaert-Delelis à la municipalité mercredi, devenant la troisième formation de Ligue 1 propriétaire de son enceinte après Lyon et Auxerre, dans le but de "diversifier ses revenus".
Le stade avait été estimé à 54,9 millions d'euros, mais la vente s'est conclue à 27 millions en raison de divers prêts, clauses et décotes, a précisé le maire PS de la ville, Sylvain Robert, lors du conseil municipal qui a entériné la transaction.
Une clause notamment interdit pendant 20 ans tout changement de nom du stade en échange d'une baisse du prix de vente de 6,5 millions, auxquels s'ajoutent 8,4 millions correspondant au bail dont bénéficiait le club jusqu'en 2052, et 10,1 millions de prêt contracté par le RC Lens auprès de la région. Le solde est constitué de décotes.
Joseph Oughourlian, président et propriétaire du club, souhaite rénover l'enceinte de 38.223 places afin d'augmenter les revenus du club. Les derniers travaux remontent à 2015, en vue de l'Euro-2016. Dix ans après, "ses infrastructures commencent un peu à vieillir", a-t-il dit en préambule du conseil municipal.
- "Lieu de vie" -
L'homme d'affaires entend créer "plus de places VIP", "développer toutes sortes d'aménagements autour du stade" dont une +fan zone+, mais aussi "changer les vestiaires", a-t-il développé.
Objectif affiché: "Transformer ce lieu emblématique en vrai lieu de vie, que ce ne soit pas un lieu qui vive seulement 18 matches par saison", soit le nombre de rencontres que le RC Lens joue à domicile.
Il a expliqué ce besoin de "diversifier (les) revenus" du RC Lens par "la fragilité des clubs de foot qui dépendent trop des droits TV".

Le bouillant public de Lens lors de la réception d'Auxerre pour le compte de la 31e journée de Ligue 1 le 27 avril 2025. Le stade Bollaert a affiché cette saison un taux de remplissage de 99%, soit 37.936 spectateurs en moyenne, davantage que la population de la ville
FRANCOIS LO PRESTI - AFP/Archives
"Il faut se préparer à des situations économiques difficiles", a-t-il insisté plus tard en conférence de presse.
Le football français traverse depuis plusieurs années une crise des droits télévisés, et l'incertitude plane sur les conditions de diffusion de la Ligue 1 la saison prochaine. Joseph Oughourlian s'est du reste érigé en figure de la fronde contre l'accord conclu in extremis l'été dernier qui avait concédé les droits TV de la Ligue 1 à la société britannique de streaming DAZN jusqu'en 2029.
Le rachat du Stade Bollaert-Delelis devrait donner plus de marge financière à un club qui a déjà assaini sa masse salariale l'hiver dernier en se séparant de plusieurs poids-louds, comme son gardien et capitaine Brice Samba et ses défenseurs Kevin Danso et Przemyslaw Frankowski.
Le club de l'Artois a également réussi la plus grosse vente de son histoire en envoyant Abdukodir Khusanov à Manchester City contre environ 50 millions d'euros durant ce mercato hivernal, qui a, en revanche, enterré ses espoirs européens. Lens a terminé huitième de Ligue 1.
- Identité minière -
Dans l'imaginaire collectif, Lens, son club et son stade sont intimement liés: "La ville de Lens, c'est le Racing, et le Racing, c'est la ville de Lens", a souligné Joseph Oughourlian en conférence de presse, Sylvain Robert évoquant un "partenariat qui ne se quantifie pas".
"Le stade Bollaert représente ma jeunesse, le métier de nos pères, de nos mères, de nos grands-parents (...) Celles et ceux qui sont dans les cimetières, maintenant, morts de la silicose", s'est ému auprès de l'AFP Pierre Mazure, adjoint au maire, 78 ans dont une cinquantaine à fréquenter les tribunes d'un stade qui porte en lui l'identité minière du club.

Une des tribunes du stade Bollaert-Delelis lors d'un match de Ligue Europa entre le RC Lens et Fribourg le 15 février 2024
Sameer Al-DOUMY - AFP/Archives
Il dit pleurer à chaque mi-temps quand, en choeur, les dizaines de milliers de supporters entonnent "Les corons" de Pierre Bachelet, hommage aux mineurs de fond.
Bollaert a affiché cette saison un taux de remplissage de 99%, soit 37.936 spectateurs en moyenne, davantage que la population de la ville (32.600 en 2021).
Inauguré en 1933, acheté à la Compagnie des mines par la ville en 1974 pour un franc symbolique, le stade a accueilli des matches des Euros 1984 et 2016 et de la Coupe du monde 1998.
L'Olympique lyonnais a inauguré début 2016 son Groupama Stadium, entouré d'un complexe, OL Vallée, qui comprend hôtel, bureaux, commerces, stade d'entraînement et une immense salle polyvalente, pour un coût déclaré de 450 millions d'euros.
Le club d'Auxerre prévoit également de rénover le stade de l'Abbé-Deschamps qui lui appartient, pour passer sa capacité de 18.000 à 23.000 spectateurs et créer de nouvelles loges pour les partenaires, outre un projet de pôle de loisirs avec hôtel.
Par Kenan AUGEARD, avec Rémi BOUVERESSE à Lille / Lens (France) (AFP) / © 2025 AFP