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Pétrole: l'avenir des raffineries françaises en question

Une des plus grandes raffineries de France à l'arrêt pour des fuites, une autre victime d'un incendie, une demande de produits pétroliers en baisse: à l'heure de la transition écologique, le climat n'est pas au beau fixe pour les employés des plateformes pétrolières françaises.

LOIC VENANCE - AFP/Archives

Une des plus grandes raffineries de France à l'arrêt pour des fuites, une autre victime d'un incendie, une demande de produits pétroliers en baisse: à l'heure de la transition écologique, le climat n'est pas au beau fixe pour les employés des plateformes pétrolières françaises.

En février, la raffinerie de Donges (Loire-atlantique), la deuxième de France, a été mise à l'arrêt pour des problèmes de corrosion et de fuites, avant un redémarrage complet espéré pour début avril.

"Les outils sont en train de payer l'absence de maintenance suffisante pendant des années et des années", peste Eric Sellini, cordonnateur CGT au sein du pétrolier TotalEnergies.

Un grief que réfute la direction du groupe: "Nous ne faisons pas d'impasse ni sur la sécurité, ni sur l'entretien nécessaire", a déclaré à l'AFP Jean-Marc Durand, directeur raffinage et pétrochimie Europe.

La demi-douzaine de raffineries conventionnelles qui demeurent en France représentent entre 5.000 et 10.000 emplois directs, selon l'Ufip, le syndicat des entreprises pétrolières.

TotalEnergies n'est pas le seul à avoir connu des incidents récents: la raffinerie Esso-ExxonMobil de Port-Jérôme, près du Havre, a été victime le 11 mars d'un incendie dans une unité de distillation, qui a fait cinq blessés légers.

Un incident que la CGT du groupe ne relie pas à un problème de maintenance.

En revanche, les représentants du personnel déplorent "un désinvestissement industriel", dit Germinal Lancelin, délégué CGT de la raffinerie.

- Compétitivité -

Les représentants du secteur récusent tout procès en vieillissement: "certaines unités datent d'il y a quelques décennies, mais tous les cinq à six ans, on est intervenu pour régler les problèmes, donc on ne peut pas dire que le parc est vieillissant", assure à l'AFP le président de l'Ufip, Olivier Gantois.

Le site ExxonMobil, à Port-Jérôme-sur-Seine en Seine-Maritime le 12 octobre 2022

Le site ExxonMobil, à Port-Jérôme-sur-Seine en Seine-Maritime le 12 octobre 2022

LOU BENOIST - AFP/Archives

"Ce qui est certain, c'est que ça fait 50 ans qu'on n'a pas construit de raffineries en France, et on n'en construira pas de nouvelles", ajoute-t-il toutefois.

Un constat qui s'explique par plusieurs facteurs. Un déficit de compétitivité, pour commencer.

Le raffinage doit acheter son énergie pour fonctionner, en particulier du gaz et de l'électricité. Or "le gaz naturel en France coûte de façon stabilisée à peu près deux fois plus cher qu'il ne coûtait avant Covid. Et avant Covid, il coûtait déjà beaucoup plus cher que ce qu'il ne coûte en Amérique du Nord", souligne M. Gantois.

"En Europe, l'énergie est chère, or pour raffiner il faut beaucoup d'énergie", renchérit M. Durand, qui nuance toutefois: "on ne reste pas les bras croisés, on investit pour réduire nos consommations d'énergie, on travaille tous les jours à essayer de garder une compétitivité".

Autre caillou dans la chaussure, le recul de la demande de produits pétroliers, avec un chauffage au fioul en perte de vitesse et l'électrification progressive du parc automobile.

A la raffinerie de Donges, TotalEnergies va toutefois investir 350 millions d'euros dans une nouvelle unité de raffinage pour produire des carburants répondant aux spécifications européennes, de quoi battre en brèche l'idée d'une disparition à moyen terme.

- Moindre besoin de personnel -

Mais c'est une exception, estime la CGT du groupe: l'heure est davantage à la conversion des raffineries en bio-raffineries, qui produisent des carburants à base de biomasse, comme à La Mède (Bouches-du-Rhône) et Grandpuits (Seine-et-Marne), des projets qui se sont soldés par des restructurations.

Ces deux sites sont ainsi passés chacun de près de 400 salariés à environ 250, selon la direction.

La raffinerie de Feyzin au sud de Lyon, le 25 novembre 2015

La raffinerie de Feyzin au sud de Lyon, le 25 novembre 2015

Jean-Philippe KSIAZEK - AFP/Archives

La CGT assure qu'un projet de ce type est dans les tuyaux pour la raffinerie de Feyzin, dans le Rhône.

"On réfléchit en permanence à ce qu'on doit faire sur chacune de nos plateformes", répond Jean-Marc Durand.

"Quand on prend les scénarios prospectifs de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), même dans le scénario Zéro Emission nette (à 2050) qui est le plus radical en termes de transformation et de défossilisation, le monde consomme encore du pétrole et la France aussi", souligne Olivier Gantois.

"En 2050, en France, il y aura peut-être encore une, voire plusieurs raffineries qui traiteront du pétrole", dit-il. "Mais il y en aura d'autres qui n'en traiteront plus, et il est probable que celles qui traitent encore du pétrole traiteront à ce moment-là un mélange de pétrole et de biomasse".

 

Par Nicolas GUBERT / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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