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De Conflans à la Sorbonne - "Il faut que les musulmans de France ne se taisent pas", clame Yacine

Pour Sud Radio, Mathilde Choin - à Conflans, au plus près de la marche blanche en l'honneur de Samuel Paty - et Clément Bargain - devant la Sorbonne - ont capté les craintes et colères d'enseignants, étudiants, mères de famille et de jeunes musulmans comme Yacine, qui ne compte pas rester coi face à la barbarie islamiste.

Autour du collège du Bois d'Aulne, ils étaient des milliers à rendre hommage à l'enseignant, mort pour la liberté d'expression, à 47 ans. (Photo Bertrand Guay / AFP)

Des reportages de Mathilde Choin et de Clément Bargain pour Sud Radio.

Des milliers de personnes se sont rassemblées mardi à Conflans-Sainte-Honorine pour une marche blanche en hommage à Samuel Paty. Depuis la mort de l'enseignant vendredi, les hommages se multiplient dans le pays. En l'occurrence, un hommage national se tient aujourd'hui dans la Cour de la Sorbonne en présence d'Emmanuel Macron, dès 17 heures.
L'émotion est encore très forte dans cette commune de 35 000 habitants. Avec sa grande pancarte "Respect et amour partout contre la barbarie", Jean-Baptiste surplombe la marche. Cet ancien instituteur vient de faire le trajet depuis la Bourgogne pour l'occasion. Il se fait le porte-voix de tous ceux qui se sont rassemblés ce 20 octobre. "On est tous bouleversés pour lui et pour sa famille. On doit absolument ne jamais oublier ce qui s'est passé et cet homme qui a oeuvré pour le bien commun jusqu'à en mourir. Et ça, c'est insupportable."

L'appel de Yacine aux musulmans à faire bloc face aux radicaux

Insupportable aussi pour Yacine qui, au milieu de collégiens, de parents d'élèves et d'habitants de la commune, participe pour la première fois de sa vie à un rassemblement. Avec ce carton "Je suis Samuel, je suis musulman", son discours est un sérieux appel aux autorités et à ses confrères de foi. "Il y a des mesures à prendre au niveau politique. Il y a trois piliers dans notre pays qui permettent de vivre ensemble : l'éducation, la santé et la justice, qui sont clairement négligées depuis de nombreuses décennies. Il faut que les musulmans de France, comme moi, ne se taisent pas, interviennent. S'ils rencontrent un prêcheur qui véhicule de la haine, il faut absolument qu'ils l'arrêtent et le signalent aux autorités. Il faut les bloquer, ça suffit, c'est beaucoup trop."
Yacine ajoute : "Normalement, je suis juste Samuel. Mais il semblerait qu'il soit nécessaire de préciser que les musulmans aussi peuvent être Samuel. Nous, les musulmans, ne cautionnons pas ça. Plus encore, nous sommes horrifiés par ce qu'il vient de se passer".
Entre les applaudissements, Inès répond aux nombreuses questions de son fils et de sa fille, respectivement âgés de 8 ans et 11 ans. La mère de famille tenait absolument à les emmener.
"Pour moi, c'est important qu'ils comprennent. Même s'ils sont encore jeunes, c'est à cet âge-là qu'il faut les éduquer, c'est à cet âge-là qu'il faut leur faire comprendre que la liberté d'expression, c'est quelque chose de très très important. Je voulais qu'ils le vivent de l'intérieur plutôt qu'à travers les médias". 
Un dialogue plus que jamais indispensable. Avant que l'Éducation Nationale ne prenne des mesures hautement symboliques, de très nombreux professeurs présents ici se préparent à en parler et à épauler leurs élèves à la rentrée.

 

À La Sorbonne, les professeurs réaffirment leur volonté de défendre la liberté d'expression tandis qu'une future enseignante s'inquiète pour son avenir

Du côté de la Sorbonne maintenant, à la veille de l'hommage national qui se tiendra cet après-midi dans la Cour d'Honneur de l'université, Clément Bargain recueille pour Sud Radio des témoignages forts. Car même si la Sorbonne ferme ses portes en raison des préparatifs cérémoniaux, cela n'a pas empêché nombreux professeurs et étudiants de se rassembler en la mémoire de Samuel Paty.

Les mines sont graves dès les premières notes de la marche funèbre de Chopin. Nombreux à être sous le choc, Michèle Coltelloni-Tranoy, directrice de l'UFR d'Histoire à la Sorbonne,

"Nous avons d'abord été terrassés par cette nouvelle, épouvantés. Et en même temps, ça nous a empli d'une colère et d'un sentiment de rester opiniâtres pour maintenir notre mission, envers et contre tous."

"La liberté d'expression, l'esprit critique, c'est le fondement non seulement de l'Éducation Nationale mais de la démocratie et de la vie en commun", ajoute Alain Talon, doyen de la faculté de lettres.

Audrey, étudiante en histoire, prépare les concours d'enseignement. Elle s'inquiète : "Ça fait un peu peur de se dire que le métier d'enseignant est visé par le terrorisme maintenant."

Un étudiant en sciences sociales, Yoan, espère surtout que cette union nationale n'accouchera pas d'une souris comme en 2015 après les attentats contre Charlie Hebdo. "Cette prise de conscience, cette idée autour du corps professoral, j'espère qu'elle va durer. L'école républicaine avait besoin de cet électrochoc".

Et c'est ici, à la Sorbonne, que Samuel Paty sera décoré de la Légion d'Honneur à titre posthume.

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