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Affaire Legay: six mois avec sursis pour le commissaire qui a ordonné la charge

Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné vendredi à six mois de prison avec sursis le commissaire qui avait ordonné la charge lors de laquelle Geneviève Legay, qui participait à une manifestation de "gilets jaunes" interdite à Nice en 2019, avait été gravement blessée.

JEFF PACHOUD - AFP/Archives

Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné vendredi à six mois de prison avec sursis le commissaire qui avait ordonné la charge lors de laquelle Geneviève Legay, qui participait à une manifestation de "gilets jaunes" interdite à Nice en 2019, avait été gravement blessée.

Le tribunal a estimé que l'ordre de charger donné par le commissaire de police Rabah Souchi "n'était pas justifié ni proportionné ni nécessaire" dans le contexte établi.

La décision est conforme aux réquisitions du parquet lors du procès des 11 et 12 janvier. Le procureur Alain Grellet avait alors estimé que l'ordre de charger les manifestants avait été donné "de manière ni nécessaire, ni proportionnelle, ni conforme à la réglementation".

L'avocat de la défense Me Laurent-Franck Liénard a dénoncé "une décision très contestable et sans surprise". "Nous allons interjeter en appel", a-t-il indiqué.

Le 23 mars 2019 à Nice, Geneviève Legay, alors porte-parole départementale d'Attac et âgée de 73 ans, avait pris part à une manifestation interdite de "gilets jaunes". Renversée dans une charge policière, elle a souffert de multiples fractures et d'un traumatisme crânien.

- "Il faut arrêter" -

"Je suis très contente de ce qui arrive aujourd'hui (vendredi, ndlr) parce que j'ai toujours voulu que la justice soit faite", a réagi Geneviève Legay à Nice, devant plusieurs dizaines de personnes venues la soutenir devant le palais de justice.

Le policier Rabah Souchi attend l'ouverture de son procès au tribunal de Lyon, le 11 janvier 2024

Le policier Rabah Souchi attend l'ouverture de son procès au tribunal de Lyon, le 11 janvier 2024

JEFF PACHOUD - AFP/Archives

"Si j'ai voulu faire ce procès, c'est aussi parce que je voulais qu'il serve à toutes les victimes de violences policières (...). Je voulais gagner pour que ça fasse jurisprudence, il faut arrêter, il faut que ça cesse", a-t-elle ajouté.

Son avocat Me Arie Alimi a salué "une décision fondamentale", en affirmant que "désormais plus aucun donneur d'ordre ne sera protégé par une immunité, une irresponsabilité en matière d'usage de la force ou des armes par les forces de l'ordre".

Le procès s'était penché sur les conditions dans laquelle la charge avait été lancée, dans un temps très court après les sommations d'usage, ce qui, selon l'accusation, n'avait pas laissé le temps aux manifestants de se disperser, ni aux policiers de se préparer correctement.

Pour la défense, au contraire, l'ordre donné était "totalement légal", selon Me Laurent-Franck Liénard, qui avait demandé la relaxe de son client.

L'avocat avait argumenté que le commissaire ne pouvait pas être poursuivi "pour un acte commis par un autre fonctionnaire", estimant en outre que les faits ne répondaient pas "aux critères de la loi en matière de complicité".

Lors du procès, Geneviève Legay avait témoigné d'une journée qui l'avait laissée "vraiment diminuée".

La militante d'Attac Geneviève Legay, grièvement blessée lors d'une manifestation des "gilets jaunes", avant le début du procès du policier Rabah Souchi, au tribunal de Lyon, le 11 janvier 2024

JEFF PACHOUD - AFP/Archives

Estimant que rien ne pouvait lui arriver, drapeau pour la paix en mains, elle avait "voulu faire un dernier tour de drapeau et dire +liberté de manifester+", avait-elle raconté.

A l'époque, les images de la septuagénaire inanimée au sol avaient fait couler beaucoup d'encre, d'autant que les autorités sont soupçonnées d'avoir cherché à étouffer l'affaire, le procureur de Nice ayant, dans un premier temps, nié tout contact entre la militante et les forces de l'ordre, une thèse reprise à l'Elysée par Emmanuel Macron.

- "Tactique" -

Poursuivi pour "complicité de violence par une personne dépositaire de l'autorité publique", Rabah Souchi a assuré que la décision de charger était "la tactique la plus efficace ce jour-là" afin de répondre à l'objectif de dispersion fixé par le préfet.

Des policiers se précipitent vers Geneviève Legay, militante d'Attac, effondrée au sol lors d'un rassemblement des "Gilets jaunes", le 23 mars 2019 à Nice

Valery HACHE - AFP/Archives

L'action se justifiait, selon lui, par la présence des manifestants sur des voies de tram et leur refus de partir alors que la manifestation était interdite.

Il a également insisté sur le rôle du policier qui a bousculé Mme Legay, estimant que cet agent s'était "détaché de l'action collective".

Ce dernier n'a pas été poursuivi, ce qui a donné lieu a des échanges poussés sur cette situation juridique au cours des différentes plaidoiries et réquisitions.

Début février, Rabah Souchi, 54 ans, a été nommé directeur adjoint de la police municipale de Nice.

 

Par Marine LAOUCHEZ, avec le bureau de Marseille / Lyon (AFP) / © 2024 AFP

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