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Hôpital : "Notre système de santé prend l'eau !" d'après Frédéric Valletoux

Quel est l'état de l'hôpital face à l'arrivée de la 5ème vague de l'épidémie de Covid ? "Notre système de santé prend l'eau !", a déclaré Frédéric Valletoux, invité du “petit déjeuner politique” le 19 novembre sur Sud Radio.

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Frédéric Valletoux, interviewé par Patrick Roger sur Sud Radio, le 19 novembre, dans "le petit déjeuner politique".

Situation de l'hôpital face au Covid, moyens, recrutement : Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France et Maire (Agir) de Fontainebleau, répond aux questions de Patrick Roger. 

Hôpital : "Notre système de santé prend l'eau !"

Nous sommes en état d'alerte face à l'arrivée de la 5ème vague a déclaré le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. Avec près de 8.000 hospitalisations, 1.300 personnes en soins critiques pour cause de Covid, certains parlent déjà de tension. "Les services ne sont pas débordés", reconnaît Frédéric Valletoux, mais il rappelle qu'il y a "un décalage entre la remontée des contaminations constatées et l'impact sur les lignes hospitalières. D'après lui, il y a des tensions car nous sommes près de 2 ans après le début de la crise, qui a pesé sur l'hôpital puisque 83% des patients avec des formes graves ont été pris en charge à l'hôpital". Les hôpitaux sont-ils prêts à la 5ème vague ? "Il faut éviter la 5ème vague, affirme-t-il. Il faut continuer à pousser la vaccination, à expliquer qu'on n'est pas sortis de cette affaire, à continuer les gestes barrières, à préserver la ligne hospitalière déjà dans une situation de difficultés plus fortes qu'il y a 2 ans".

Si Frédéric Valletoux reconnaît que "le Ségur de la Santé est une avancée historique, avec 8 à 9 milliards d'euros pour les rémunérations des soignants, pour revoir les déroulements de carrière", pour lui, "ça ne suffit pas ! Tout le monde fatigue, parce que c'est sur l'hôpital que pèsent tous les dysfonctionnements du système de santé qui prend l'eau. Notre système de santé prend l'eau !, insiste-t-il. Le gouvernement agit, augmente le numérus clausus. Mais beaucoup d'étudiants en école d'infirmière quittent après les premiers stages. Malgré tout, l'hôpital tient, mais on ne peut pas à l'infini leur demander l'impossible. Dans la médecine de ville, la crise est réelle, il y a de moins en moins de généralistes et ils bossent comme des damnés : on a perdu 5.000 généralistes ces 10 dernières années, on en perdra 5.000 ces 5 prochaines années".

"L'hôpital a abordé la situation dans une situation déjà tendue, souligne-t-il, et ça ne va pas mieux, c'est même plus tendu. On manque de soignants, ce qui a obligé à fermer des lits. On a une tension très forte sur les soignants, avec cette fatigue qui rend le quotidien difficile, qui a fait que certains ont quitté l'hôpital pour aller ailleurs. On n'a pas de chiffres globaux mais 6% des lits sont fermés parce qu'on ne peut pas mettre de soignants autour, pas par mesure d'économie, mais parce qu'on manque de soignants".

 

2% des hospitalisations en 2020 auraient été dues au Covid-19 : "Ce chiffre ne peut pas être vrai !"

 

Le chiffre de 2% des hospitalisations en 2020 qui auraient été dues au Covid-19 selon l'Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) est-il vrai ? "Ce chiffre ne peut pas être vrai !, dénonce Frédéric Valletoux. C'est un chiffre maladroit qui a été utilisé pour faire penser que le Covid était marginal dans l'activité hospitalière. Or, le Covid, ce sont des moments de fortes tensions et des moments de détente. Les pics épidémiques ont amené certains hôpitaux à multiplier par 4 ou 5 les lits de réanimation et donc à faire appel à plus de personnel, avec une désorganisation de l'hôpital".

"Ce chiffre n'est pas complètement faux, mais si les pics ne durent que quelques semaines, on voit bien que par la mathématique, on fausse complètement la moyenne. La mobilisation de l'hôpital sur les patients Covid lors des moments de pics n'est pas une invention, c'est une réalité. Chez moi à l'hôpital de Fontainebleau, on a fait fois 6 le nombre de lits de réanimation, souligne-t-il, donc il faut faire fois 6 le personnel, sachant qu'il faut 6 ou 7 personnels par lit. L'hôpital s'est consacré pendant des périodes précises à la prise en charge des patients Covid et ça l'a déstabilisé".

D'après les statistiques du ministère de la Santé, il y a de plus en plus de personnes vaccinées admises chaque jour en réanimation. "On peut le penser même si les non vaccinés restent le plus majoritaires dans les services de réanimation, c'est-à-dire qui développent des formes graves. Il faut accélérer la 3e dose", estime Frédéric Valletoux.

Frédéric Valletoux : "La bureaucratie est moins à l'hôpital qu'autour de l'hôpital"

Dans la pré-campagne de la présidentielle qui a démarré, quasiment tout le monde affirme qu'il y a trop de tâches administratives à l'hôpital : un tiers de la fonction publique hospitalière serait dédiée à l'administratif. "Je ne sais pas d'où sort ce chiffre, qui n'est pas documenté !, s'insurge Frédéric Valletoux. Les chiffres du ministère de la Santé montrent qu'il y a 10 à 14% en France d'emplois administratifs et encore, on compte les secrétaires médicales qui sont là pour épauler les médecins".

"Mais ce qui est vrai, c'est que le système de santé s'est bureaucratisé. La bureaucratie n'est pas dans les 4 murs de l'hôpital, il y en a toujours un peu ici ou là, mais la vraie bureaucratie, c'est celle qui s'est développée au dessus de la tête des hospitaliers, dans les agences nationales, dans les ARS, dans les services du ministère de la Santé. La bureaucratie créée depuis une quinzaine d'années est très forte, et rend très lourd l'exercice des hospitaliers mais aussi des médecins généralistes. Pour lui, la bureaucratie est moins à l'hôpital qu'autour de l'hôpital".

"Il manque 100.000 personnes dans les métiers du grand âge"

Comment faire face, à court terme, à cette pénurie de soignants ? Combien de personnes faudrait-il recruter et quels personnels ? "Il faudrait recruter 25.000 infirmiers-infirmières, aides soignants-aides soignantes pour permettre au moins de combler les postes vacants, estime Frédéric Valletoux. Mais il ne faut pas oublier le champ du médico social : il manque 100.000 personnes dans les métiers du grand âge pour les 5 prochaines années, si on veut faire face au choc démographique de la vieillesse de notre pays".

"Ça fait des années que des rapports montrent la crise des vocations dans les métiers du soin, ajoute-t-il et ça fait des années qu'on a des gouvernements qui ont fait l'autruche. Le gouvernement actuel essaie de faire des choses, mais il faudra aller beaucoup plus loin dans le prochain quinquennat. La crise a montré qu'il ne fallait plus de demi-mesures". Certains services ont fermé la nuit. "Les tensions sur les services d'urgence sont réelles. On fait jouer à l'hôpital tous les rôles à la fois. Il faut tout remettre à plat. Pour cet hiver, tout le monde doit se mobiliser pour aider les hôpitaux, y compris les cliniques".

 

 

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