Reportage de Mathilde Jullien pour Sud Radio
"Il ne faut surtout pas ajouter un risque pour leur santé à celui de l'épidémie"
Cette dérogation au droit du travail s'est décidée sans concertation préalable avec les syndicats, déplore Yves Veyrier, secrétaire général de Force Ouvrière, pour qui c'est une erreur. Il craint pour la santé des salariés : "même si ce sont les salariés des secteurs essentiels à la continuité de la Nation, il ne faut surtout pas ajouter un risque pour leur santé à celui de l'épidémie, considère-t-il. On a besoin d'eux, il faut plutôt les ménager que les mettre sous pression. On risque plus d'accidents de travail, des arrêts liés à la fatigue", redoute-t-il.
Selon lui, "ça n'est pas plus de durée du travail, moins de repos qu'il faut dans ces secteurs essentiels. Ça passe par la concertation, le dialogue social, la négociation collective, estime-t-il. D'une entreprise à l'autre, les situations ne sont pas les mêmes, et le cadre doit être celui de la négociation collective entre les représentants des salariés et les employeurs".
"Ça va nous permettre de nous rassurer, nous, chefs d'entreprises, de pouvoir payer les gens en les déclarant normalement 60 heures"
Loin d'être une erreur, pour Jean-Charles Potelle, PDG de Boldoduc, un groupe qui produit du textile technique pour blanchisserie industrielle et qui a reçu l'agrément pour produire des masques, c'est du bon sens, car les employés travaillent déjà au delà des 35 heures vu l'urgence de la situation. Une course contre la montre qui a commencé il y a dix jours : "C'est une course contre la montre pour mettre au point ce produit, alors qu'à la base on n'est pas fabricant de masques, explique Jean-Charles Potelle. On se doit de fournir le plus vite possible les personnels qui sont le plus exposés. Tout le monde a travaillé à marche forcée pendant une semaine complète la semaine dernière, 7 jours sur 7, quasiment 20 heures sur 24".
Avec un rythme à marche forcée, les employés ont déjà dépassé les 60 heures par semaine. Ce rythme sera légal une fois les ordonnances publiées. "Ça va nous permettre de nous rassurer, nous, chefs d'entreprises, de pouvoir payer les gens en les déclarant normalement 60 heures, confie-t-il. On a déjà embauché deux personnes supplémentaires pour nous aider, on va embaucher encore plus. Sur cette période-là, une période courte, il faut qu'on soit opérationnels, on n'a pas vraiment le choix !" De 340 salariés la semaine dernière, l'entreprise en comptera 1.000 d'ici la semaine prochaine, pour une production de 50.000 masques au moins par jour.
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