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Philippe Juvin - Covid-19 : "on se prépare à 3 mois d'épidémie avec plus de patients que la grippe"

Philippe Juvin, Professeur de médecine, chef du service des urgences de l’hôpital Pompidou, était l’invité du “petit déjeuner politique” de Patrick Roger le 13 mars sur Sud Radio, à retrouver du lundi au vendredi à 7h40.

Philippe Juvin, interviewé par Patrick Roger sur Sud Radio le 13 mars à 7h40.

Philippe Juvin : "qui va garder les enfants des infirmières, des médecins, des personnels des Ehpad ?"

Emmanuel Macron a annoncé jeudi 12 mars la fermeture de tous les établissements scolaires à compter de lundi 16 mars. "Au plan médical, la fermeture des écoles est une bonne décision, reconnaît Philippe Juvin au micro de Patrick Roger. Quand on a l'expérience de la grippe, on sait que quand les écoles sont fermées, cela freine les épidémies, parce que les enfants sont un réservoir de virus, se contaminent très facilement. Mais le bémol : qui va garder les enfants des infirmières, des médecins, des personnels des Ehpad ? Tous ces gens qui sont indispensables au bon fonctionnement de la chaîne de santé. C'est un sujet de préoccupation pour les personnels soignants la garde des enfants, insiste-t-il.

 

Le président de la République promet des aides de garde : mais si c'est une garde collective, ça ne sert à rien, ça revient à ouvrir l'école. Si ce sont des gardes individuelles, qui va les assurer ? s'interroge-t-il. Je crains de l’absentéisme des infirmières, des médecins qui ont des enfants. Peut-on imaginer un système pour que les enfants des personnels soignants puissent aller en nombre restreint à l'école ? L'Éducation nationale est là pour trouver des solutions techniques à une décision politique", estime-t-il.

"La mise en mesure de la fermeture des écoles va être complexe si on veut que la chaîne de soins fonctionne, redoute Philippe Juvin. Chez les Chinois, le premier cas date du 7 décembre : on est à plus de 3 mois. Ils sont en phase très descendante, c'est presque terminé, donc c'est 3 bons mois. Ce ne sera probablement pas 3 mois de fermeture d'école, mais la mobilisation générale de la nation va se poursuivre au moins jusqu'à l'été".

 

"Au niveau médical, fermer les écoles est une bonne idée, fermer les bureaux de vote aurait été absurde !

Les élections municipales sont pour le moment maintenues. Pour Philippe Juvin, "c'est une bonne décision de maintenir les élections municipales : on y fera la queue comme chez le boulanger ou comme quand on sort son chien ! Il faut bien que la vie continue. Dans les bureaux de vote, beaucoup de maires ont organisé les isoloirs pour ne pas avoir à toucher le rideau, explique-t-il. Vous pouvez apporter votre stylo à bille bleu", recommande-t-il.

"Emmanuel Macron a demandé aux plus de 70 ans de limiter leurs déplacements, souligne Philippe Juvin, et il a raison. Il faut limiter les endroits clos d'une manière durable, comme une salle de spectacle ou un cinéma, mais on peut sortir dans la rue, au parc, acheter une baguette, et voter !" Y avait-il urgence à voter ? s'interroge Patrick Roger. "On va avoir besoin des maires sur le terrain, estime Philippe Juvin. Les maires auront besoin de légitimité, il faut aller voter. Au niveau médical, fermer les écoles est une bonne idée, fermer les bureaux de vote aurait été absurde !"

 

"Il va falloir tenir physiquement, humainement et sur le plan du matériel"

Il n'y a pas eu d'information sur les masques lors de l'allocution du chef de l'État. "Nous avons des réserves de masques très insuffisantes, reconnaît Philippe Juvin, en particulier en médecine de ville". Concernant les opérations qui ne sont pas indispensables, "c'est normal de différer les opérations et interventions qui peuvent attendre, confirme-t-il. Par exemple, varices, prothèses, etc... Ce qui permet de récupérer du personnel pour la prise en charge des 'vrais' malades".

"Ne venez pas aux urgences pour des petits bobos, allez voir votre médecin traitant ! rappelle Philippe Juvin. D'ailleurs, depuis une semaine, il y a heureusement moins de monde aux urgences pour des petites bêtises, ajoute-t-il, et c'est pour ça qu'on tient ! Nous entrons dans une phase compliquée, où nous aurons probablement une vague de patients qui arrivera à l'hôpital. Certains seront très graves et il faudra y consacrer beaucoup de temps, mais même un patient pas grave nous prend du temps, explique-t-il. 

Le nombre de lits de réanimation est-il suffisant ? "C'est un des points sensibles, reconnaît-il là encore. Nous avons recensé tous les lits dans mon hôpital, à Pompidou, nous pouvons accueillir 100 personnes intubées et ventilées, ce qui est déjà énorme. Selon Philippe Juvin, "on entre dans une période où il faudra éviter la désorganisation, et il va falloir tenir physiquement, humainement et sur le plan du matériel, c'est une épreuve de vérité collective".

 

"Oui le coronavirus est plus grave que la grippe"

Les médecins disent aujourd'hui que c'est bien plus grave que prévu. "Ceux qui disent que c'est une 'grippette' vous trompent ! affirme Philippe Juvin. Il semble qu'on ait un taux de mortalité plus important. Oui, le coronavirus est plus grave que la grippe. Comme toutes les maladies virales, ce sont globalement les patients âgés qui meurent plus, avec des pathologies associées, en particulier respiratoires. Il y aura aussi des jeunes qui vont mourir, mais comme pour la grippe, prévient-il. Mais c'est attendu, il n'y a pas de panique à avoir, parce qu'on sait que ça va arriver".

"C'est un guerre, il faut la gagner, et pour la gagner il faut s'organiser. Nous verrons dans 3 mois", ajoute Philippe Juvin.

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