Retour sur les élections municipales dont le deuxième tour aura donc bien lieu mais le dimanche 28 juin…
C’est-à-dire très exactement quinze semaines après le premier tour, du jamais vu. Une élection totalement bousculée, malmenée, tronquée même (disons-le) par cet événement extra-ordinaire qu’est la pandémie du coronavirus. On peut s’interroger sur l’impact des mois de confinement sur les choix des électeurs et, dans une certaine mesure, sur la sincérité même du scrutin.
Songez que plus de trois mois et demi vont séparer les deux tours dans ces conditions : comment les électeurs vont-ils se remobiliser ? comment vont-ils pouvoir appréhender les enjeux politiques et les rapports de force locaux établis par le premier tour, qui ne sont plus vraiment dans les têtes ? Et surtout comment les candidats vont-ils pouvoir se faire entendre, en seulement quatre semaines de campagne, et alors que les Français pensent d’abord à garder leur travail, et à s’en sortir dans la crise qui s’annonce ?
Vous n’estimez tout de même pas que le scrutin est « faussé » par cette situation ?
Certains le pensent et contesteront la légitimité de ces municipales 2020.
Prenez l’exemple de Marseille, où la gauche réunie a créé la surprise au soir du premier tour, puisqu’elle peut – peut-être - remporter la mairie. Sa force, c’est qu’elle est unie, alors que la droite marseillaise se déchire, très bien. Ça a joué bien sur. mais pas que ! L’électorat plus traditionnel de la droite à Marseille (les plus agés notamment), s’est beaucoup abstenu au premier tour, en partie par crainte du virus.
Vous dites aussi qu’il y a une sorte de prime médiatique accordée aux sortants ?
Disons qu’en ce moment, lorsque les équipes municipales sortantes qui sont encore aux commandes parlent dans les médias de leurs plans de gestion du déconfinement, lorsqu’elles évoquent par exemple les règles d’utilisation des terrasses, pour la réouverture des restaurants, on n’entend qu’eux. Et ça leur donne un avantage certain, pendant que leurs opposants sont confinés (si j’ose dire) à des sujets politiciens, quand les sortants ont le beau rôle…
C’est le cas à Toulouse, par exemple, où le maire sortant, le centriste Jean-Luc Moudenc, arrivé en tête, est pourtant donné battu par un sondage Ifop, si la gauche toulousaine fusionne ses listes.
Mais le cas le plus flagrant c’est Paris, où Anne Hidalgo communique à tout va sur son « plan terrasses » et où l’opposition et Rachida Dati sont inaudibles…
Bon, mais a-t-on le choix ? Il faut bien renouveler les conseils municipaux et en finir, non ?
Pour les familles et les proches des élus et assesseurs morts du Covid-19 et contaminés au cours des opérations de vote du 1er tour, oui, clairement, on avait le choix ! Beaucoup pensent qu’il aurait fallu repousser les municipales à 2021…
Mais aujourd’hui, c’est trop tard : et tout le monde veut tourner la page de ces municipales, d’abord parce qu’il reste à peu près 5000 communes (les plus grosses), où les électeurs doivent trancher. Ensuite, parce que derrière tout ça, il y a une affaire de gros sous : ce sont les nouveaux conseils municipaux qui vont voter les budgets des travaux, essentiels pour la relance du secteur du bâtiment.
Et puis, il en est un qui veut qu’on en finisse et qu’on oublie vite les affaires Griveaux, Buzyn, Sibeth N’diaye, c’est bien sûr Emmanuel Macron. Une fois la séquence politique des municipales achevée, le président de la République espère pouvoir reprendre en main sa majorité, qui se divise et peut-être remanier pour se débarrasser notamment de ce premier ministre qui lui fait de plus en plus d’ombre !