Retranscription des premières minutes :
- Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
- Sud Radio, les clés d'une vie, celle de mon invité.
- La femme que vous êtes ne s'en est jamais laissée compter.
- La romancière que vous demeurez a consacré plus de mille et une nuits à écrire des romans, dont le dernier résume justement cette force de travail.
- Bonjour Irène Frein.
- Bonjour Jacques Pessis.
- Alors on se retrouve pour un livre, L'or de la nuit, qu'on va évoquer, le grand roman des mille et une nuits qui sort chez Julliard.
- Mais vous savez que le principe des clés d'une vie, c'est aussi de parler de votre parcours, bien au-delà de mille et une nuits, votre parcours tout au long de votre vie de romancière et pas seulement.
- Donc ce sont des dates clés.
- Et la première que j'ai trouvée, c'est le 14 décembre 1979.
- Votre première télé régionale, la télé Pays de la Loire, vous présentez un livre qui s'appelle Quand les Bretons peuplaient les mers, sous le nom de Irène Frein-Leporon.
- Vous vous en souvenez ? Non.
- C'est-à-dire que c'est une télé, une télé, c'est votre première télé.
- Et vous évoquez ce roman, ce livre, Quand les Bretons puplaient les mers, qui a été un livre important pour vous.
- Ah oui, je me souviens très bien de ce livre.
- En fait, à l'époque, j'étais prof assistante en Sorbonne, de latin.
- Je préparais une thèse sur le vocabulaire latin du temps, chez les poètes du premier siècle avant Jésus-Christ.
- Vous voyez à quoi vous avez échappé.
- Et là, un historien, Pierre Miquel, collection d'histoires régionales qui commence par quand.
- Alors, il y avait quand les Anglèves en danger à l'équitaine, par exemple, me confie quand les Bretons peuplaient les mers.
- Et moi, je lui dis, mais attendez, moi, je suis bretonne.
- Oui, il me dit, c'est pour ça que je vous appelle.
- OK, très bien, mais c'est vaste, l'histoire de la Bretagne.
- Il me dit, écoutez, sur les oubliés de l'histoire bretonne, ceux dont on ne parle jamais, les pauvres, les sans-grades.
- Alors là, j'ai dit oui.
- Et j'ai tout lâché le matin.
- Comment il vous avait repéré, Pierre Miquel ? Il m'avait repéré parce que j'étais la prof de son fils, qui était particulièrement, comment dire, peut-être pas turbulent, mais un peu perdu, je dirais.
- Et il était venu me voir et j'avais été cash avec lui.
- J'ai toujours été cash dans ma vie.
- Je n'avais pas, je lui avais ciblé les problèmes de son fils.
- Je crois même qu'il m'avait demandé de mettre ça par écrit.
- Je l'avais fait et il avait été sans doute impressionné par mon écriture et aussi par les cours de français que je donnais à son fils.
- Mais vous ne pensiez pas devenir romancière à l'époque, Irène Frein ? Non, pour moi, les écrivains, c'était des gens inaccessibles.
- Ils étaient déjà inaccessibles du temps que j'étais petite et où je voyais les livres, les prix littéraires, par exemple, ce que rapportait ma soeur Denise.
- Ma soeur est née dans notre tout petit milieu.
- On était très, très pauvres.
- Et moi, j'étais attirée par l'école.
- Je travaillais bien à l'école.
- Je savais que c'était un passeport pour m'en sortir.
- Mais les écrivains, d'abord, à l'époque, on ne les voyait pas.
- Il n'y avait pas la télé.
- On les entendait peu à la radio ou alors dans des émissions pendant lesquelles moi, j'étais à l'école où je dormais.
- Et c'était Paris.
- Et c'était presque des gens qui n'avaient pas de consistance.
- Et un peu...
- Un peu comme des demi-dieux, mais qui parlaient depuis un monde extrêmement lointain.
- Il fallait surtout s'incliner devant eux.
- Oui, en même temps, les livres, ça vous attirait ? Les livres, ça m'attirait parce que mon père considérait que c'était le passeport pour se sortir d'une vie de pauvre, en fait.
- Et lui, il s'était sorti pendant...
- Quand il avait...
- Il était gardien de vache.
- Donc, quand il était parti à Lorient, il avait, comme il m'avait dit, réappris le français qu'il avait désappris quand on l'avait sorti de l'école.
- Alors, ça, c'est à 11 ans, quoi.
- Sa mère n'avait pas d'argent pour écouter l'instituteur qui voulait qu'il passe au collège.
- Et...
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