Retranscription des premières minutes :
- Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
- Les clés d'une vie, celles de mon invité, le critique que vous êtes a consacré sa vie à mettre en pleine lumière celles et ceux que l'on découvre habituellement dans des salles sombres.
- Vous vous leur rendez hommage dans un livre où vos oraisons n'ont rien de funèbre.
- Bonjour Serge Toubiana.
- Bonjour Jacques Pessis.
- On connaît votre nom comme critique, vous avez copié la cinémathèque, on va en parler, et vous publiez un livre, on ne connaît du film que la scène des adieux, chez Calman Levy.
- Un livre sur les personnalités que vous avez rencontrées, on va en parler aussi tout à l'heure.
- Mais le principe des clés d'une vie, c'est d'évoquer votre parcours à travers des dates clés.
- Et la première que j'ai trouvée, car elle est importante dans votre parcours, le 6 septembre 1954 est sorti ce film.
- L'Astrada, l'histoire d'une jeune femme simple d'esprit qui est vendue par sa mère à un forain ambulant qui l'emmène sur les routes.
- Et ce film, je crois, vous a marqué la vie.
- C'est un film que je n'ai pas pu regarder.
- Je mettais ma main devant l'écran tellement j'étais, je ne sais pas comment vous dire, horrifié.
- Mais j'avais 6 ans.
- J'étais un enfant.
- Et je ne sais pas pourquoi, mes parents, mon père et ma mère, nous étions à Tunis, alors que je suis né à Sousse, qui est une ville très agréable en Tunisie, à 130 kilomètres de Tunis.
- Ce jour-là, nous étions à Tunis, un après-midi, je crois.
- Et je ne sais pas pourquoi, mes parents m'ont emmené avec eux voir ce film.
- Et je n'ai toujours pas compris aujourd'hui pourquoi ils m'ont emmené voir ce film, qui n'était pas un film pour enfants.
- Et je ne sais pas pourquoi, j'ai eu une espèce d'aversion, de phobie pour ce film, pour les personnages, pour la misère, pour le noir et blanc, l'Italie pauvre.
- Pour ce personnage joué par la femme de Fellini.
- Julieta Massina.
- Julieta Massina, Anthony Quinn, la violence, la promiscuité entre eux.
- Je ne sais pas, il y a quelque chose qui m'a dit...
- Ce n'était pas pour moi.
- Donc ce film m'a marqué et a été décisif dans ma vie.
- Par le refus, pas du tout par l'adhésion ou l'enthousiasme, mais par la peur.
- Vous l'avez revu en 2009, je crois.
- Oui, bien après.
- Je dirigeais la Cinémathèque, j'ai fait un hommage à Fellini dans la retrospective et je me suis obligé à le revoir.
- J'ai vu le chef-d'oeuvre.
- Oui, parce qu'en fait, il se trouve que Fellini a fait ce film et qu'aucun distributeur n'en voulait au départ.
- Et finalement, ça a été un tel succès que Julieta Massina est devenue le charlot féminin en Italie.
- Exactement.
- Alors, vous vivez donc à Sousse, à 143 km de Tunis, et c'est une ville qui est curieusement jumelée à Nice depuis 2012, où il y a des studios de cinéma.
- La Victorine, bien sûr, oui.
- Alors, il se trouve que votre famille n'est pas du tout dans l'univers du cinéma, je crois, au départ.
- Votre père est horloger.
- Mon père est horloger, bijoutier.
- J'ai compris bien plus tard.
- Le rapport qu'il y a entre l'horlogerie et le cinéma, parce qu'il y en a un, vous savez, et ma mère était institutrice, puis directrice d'école.
- Je suis vraiment né dans une école pour enfants.
- Mais le rapport que je n'ai jamais...
- Je n'ai compris qu'après sa mort, le lien qu'il y a entre l'horlogerie, le mécanisme de l'horlogerie et le cinéma.
- Les Frères Lumière, qui ont inventé le cinématographe il y a 130 ans, ce qu'ils ont inventé, en fait, c'est le mécanisme de la roue qui entraîne la pellicule.
- La pellicule dans la caméra Lumière.
- Et c'est un mécanisme qui, vraiment, provient de l'horlogerie.
- C'est fou, ça.
- Et je m'en suis voulu de ne pas avoir saisi cela plus tôt pour avoir une plus grande connivence avec mon père.
- Alors, Stéphane Choubiana, on a découvert aussi, c'est un cinéphile qui a compté le nombre de films où les montres étaient associées, les montres de luxe étaient associées.
- Il y en a une cinquantaine aujourd'hui,...
Transcription générée par IA