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Le regard libre d'Elisabeth Lévy - L'État joue à Big Mother

Ce dimanche après-midi se tenait une conférence de presse - aux airs d'allocution - durant laquelle Olivier Véran et Edouard Philippe n'ont eu de cesse de répéter aux Français de se laver les mains, entre autres. Mais imagine-t-on le général De Gaulle terminer un discours par un "Prenez soin de vous" ? Cessons d'infantiliser.

Le regard libre d'Elisabeth Lévy

Chaque matin, retrouvez le regard libre d'Élisabeth Lévy à 8h10 sur sudradio.fr.

 

Édouard Philippe l’a répété. La vie d’après ne ressemblera pas à la vie d’avant. Qu’est-ce qui va le plus changer? 

Imagine-t-on le général de Gaulle dire aux Français « prenez soin de vous », mots par lesquels le premier Ministre a conclu la conférence de presse hier ?  

Le changement à l’œuvre. L’État est aux manettes de notre vie collective et de nos existences individuelles, mais on ne parle pas d’un État autoritaire, oppresseur, pour tout dire patriarcal, cette fois, c’est l’État nourricier et consolant, un maternant, baptisé Big Mother par le psychanalyste Michel Schneider, un État où la bonté supplante l’autorité. Au risque de nous transformer en enfants gâtés estimant que tout leur est dû. 

Vous avez trouvé Edouard Philippe maternel ? 

Puisque les mères et les pères c’est pareil, disons parental (et professoral). Comme tous les parents, il répète pour que ça rentre. “Lavez-vous les mains”. Le 11 mai, ce ne sera pas la fête. Il s’inquiète pour nous. Olivier Véran nous a conseillé d’aller chez le psy si on se sentait mal. Le gouvernement va-t-il ouvrir une ligne SOS Français en détresse ?

Le premier Ministre l’a martelé : la santé des Français est notre première préoccupation. Avant la continuité de la vie de la nation. 

Cela vous choque qu’on s’inquiète de la santé des Français ? 

Cela m’étonne que ce soit une fin en soi. Et la priorité absolue. Si le général De Gaulle avait pensé que la santé prévalait sur la continuité de la nation, il n’aurait pas lancé l’appel du 18 juin. 

Cet idéal d’un “gouvernement qui soigne” vient de sociétés qui rêvent de sortir de l’histoire. La grande salle de gym de Peter Sloterdijk. 

Cependant, on n’a rien à reprocher au gouvernement puisqu’il répond à une demande sociale irrésistible et folle de sécurité illimitée. Selon un sondage CEVIPOF, 44 % des Français préfèreraient moins de démocratie mais plus d’efficacité.

Hier, BFM titrait : “Écoles : peut-on rouvrir sans risques ?” Et bien non, on ne peut pas. Mais, sauf à vivre sous protection, donc sous perfusion, il faudra bien les ouvrir. 

À vous entendre, il faudrait laisser l’épidémie tuer des gens. 

Pas du tout. Je prends au sérieux ce qu’on m’a dit. Nous devons vivre avec le virus. Et avec le risque qui est la trame même de l’existence humaine. 

La peur est légitime, mais histoire humaine est faite de peurs surmontées. On ne peut pas aller travailler sans prendre un risque. Et on ne peut pas non plus tomber amoureux, acheter une voiture d’occasion, découvrir l’Amérique ou un vaccin contre la rage sans risque. 

Vivre tue, ce n’est pas une raison pour arrêter.

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