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Le regard d'Elisabeth Lévy - "Main lourde avec la France des bistrots, mort de peur devant celle des banlieues"

Alors que la manifestation de soutien à la famille d'Adama Traoré était interdite en pleine crise sanitaire, l'apathie des forces de l'ordre - donc du pouvoir par biais direct -, a de quoi révolter. Alors qu'un an plus tôt, cette police n'a pas fait dans la dentelle face aux gilets jaunes. Pourquoi le pouvoir cède-t-il aux pressions des banlieues ?

Tous les matins à 8h15, le regard libre d'Elisabeth Lévy dans le Grand Matin Sud Radio.

 

Les appels à manifester demain contre les violences policières se multiplient.

Depuis la manifestation interdite de mardi à Paris, il y a eu beaucoup de petits rassemblements. Notamment hier soir, quand 2000 personnes se massaient à Lille. Ce samedi, il y a des appels à se rassembler à Marseille, Montpellier, Bordeaux et Paris, place de la Concorde, devant l’ambassade américaine. 

Les uns réclament Justice pour Adama, les autres brandissent des pancartes Je ne peux pas respirer. Tous sont contre la violence et le racisme de la police, entre lesquels on établit un continuum. 

Y a-t-il un risque que ça dégénère en vaste protestation ? 

Depuis, la France s’ennuie. De 1968 aux Gilets jaunes, les sociétés humaines échappent au pronostic. Certains fantasment des Gilets noirs et d’un embrasement à l’américaine. Sauf que même pour les États-Unis, l’idée d’un embrasement général est un fantasme. 

Pour l’instant, ce ne sont majoritairement que des jeunes privés de cours et en quête de cause. Avec George Floyd, ils en ont désormais une, indiscutable. Nous avons tous été bouleversés par l’injustice filmée en direct. Ce fameux “village global”, c’est d’abord la globalisation de l’émotion.

À terme, ce qui est beaucoup plus dangereux, c’est l’assimilation US/France et la racialisation du débat en France, comme l’a fait hier Virginie Despentes sur France Inter. 

À court terme, c’est surtout un problème de maintien de l’ordre. 

Un casse-tête. Car les responsables policiers doivent arbitrer entre deux risques :

  • Leur terreur étant qu’il y ait un mort ou un blessé grave. Leur seule façon de ne prendre aucun risque ? Ne rien faire. Et laisser des voitures brûler. 
  • Que l’État semble tragiquement faible. 

En l’occurrence que faut-il faire ? 

En réalité, il n’a pas de réponse magique. Ça dépend de qui est derrière, des instrumentalisations, des manipulations. Et du nombre. 

Si ce sont les mêmes organisateurs, il y a clairement une volonté de défier l’État. Une fois, d’accord, c’était l’émotion et cætera et cætera mais là, il ne faut plus laisser passer. Vous ne pouvez pas enserrer le citoyen lambda dans un corset de règles sanitaires ubuesques et laisser ces gens se moquer ostensiblement de la loi. 

Avec les Gilets jaunes, la police n’a pas fait dans la dentelle. Personne ne souhaite revoir des affrontements et des mains arrachées mais quand on lui en a donné l’ordre, elle a réussi à empêcher les Gilets jaunes d’approcher des Champs-Élysées. Le plus désastreux serait de donner l’impression que le pouvoir a la main lourde avec la France des bistrots et des provinces et qu’il est mort de peur devant celle des banlieues. 

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