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La mobilisation du service public, traduction de la crise de l'État en France

On a trop parlé, pendant des années, des services publics comme étant des entreprises comme les autres. On n'est pas client de l'hôpital, on n'est pas client des services publics.

 

C’est le service public au sens large qui se mobilise jeudi, il n’y a pas que des agents de service public ayant le statut de fonctionnaires, c’est le cas des cheminots ou des contractuels.

En France, c’est pour les trois fonctions publiques, environ 5,4 millions de personnes. Si on prend l’ensemble des entreprises publiques, c’est pas loin de 6 millions de personnes au total.

Demain, presque toutes ces catégories vont manifester pour leur statut, leurs conditions de rémunération, de travail. Mais derrière ces manifestations, il y a un malaise profond.

C’est d’abord le malaise de l’État au sens large dans une société française construite autour de l’État. Il y a des pays où la société civile a fait la nation et a fait l’État, il y a des pays comme la France où l’État a fait la société civile et a fait la nation. On a donc un rapport à l’État beaucoup plus profond et très différent qu’outre-Atlantique par exemple.

Mais cette fonction publique au sens large vit mal la crise de l’État en France, cette critique permanente de l’autorité de l’État, cette difficulté aussi que l’État a à trouver sa place dans un monde globalisé. C’est la difficulté aussi de définir clairement les missions. On pourrait se lever, pratiquement, pour écrire au tableau dans tous les séminaires des entreprises publiques : ‘SNCF, quelles missions ?’, ‘EDF quelles missions ?’, ‘Les hôpitaux, quelles missions ?’.

Ils ne savent plus très bien quelles sont leurs missions parce qu’on a trop parlé, pendant des années, des services publics étant des entreprises comme les autres, ayant devant eux des clients. Et bien non, on n’est pas client de l’hôpital en France, on n’est pas client d’un service public.

On est des citoyens face au service public. Il y a un principe d’égalité. Le service public, c’est ce qui assure la cohésion de la nation, qui assure une des garanties du service d’égalité, une des façons de redistribuer, aussi.

Tout cela est remis en cause depuis des années. Il y a une crise extrêmement profonde et la logique budgétaire d’un côté, financière de l’autre, pour les grandes entreprises publiques, a beaucoup miné la culture du service public. On se retrouve donc devant ce malaise considérable de la fonction publique et des agents publics.

Au demeurant, les chiffres des effectifs et des dépenses ont beaucoup augmenté depuis le début des années 1980, mais parce que les désordres se sont aussi considérablement accrus dans la société. Les services publics se développent pour essayer de corriger ces désordres.

Mais donne-t-on aujourd’hui au service public les moyens de corriger les désordres ? La réponse est non.

Demain, on voit bien que le risque est une accumulation de crises sectorielles. Je pense à la terrible crise de l’hôpital, où on a supprimé des lits pendant des années et aujourd’hui, on manque de lits et les gens qui vont aux urgences sont obligés de dormir sur des brancards. C’est emblématique de tout le reste.

Écoutez la chronique d'Henri Guaino dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard

 

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