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Assassinat du professeur Samuel Paty: les premiers accusés entendus contestent les faits

Les premiers accusés entendus mardi par la cour d'assises spéciale de Paris, au procès des huit personnes impliquées à des degrés divers dans l'assassinat du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, ont tous contesté leur participation.

Benoit PEYRUCQ - AFP

Les premiers accusés entendus mardi par la cour d'assises spéciale de Paris, au procès des huit personnes impliquées à des degrés divers dans l'assassinat du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, ont tous contesté leur participation.

"Je conteste les faits qui me sont reprochés", a affirmé Azim Epsirkhanov, 23 ans, jeune Russe d'origine tchétchène.

"Je les conteste depuis quatre ans", a lui aussi dit Naïm Boudaoud, 22 ans.

Les deux jeunes gens, amis du tueur Abdoullakh Anzorov, sont les deux seuls accusés poursuivis pour complicité d'assassinat, un crime passible de la réclusion criminelle à perpétuité.

Les six autres accusés sont poursuivis pour participation à une association de malfaiteurs terroriste, un crime passible de 30 ans de réclusion.

Seule femme parmi ces accusés, Priscilla Mangel, 36 ans, qui comparait libre, a également fermement contesté les accusations portées à son encontre.

"Je conteste avoir eu la moindre influence sur Anzorov", a-t-elle dit à la barre.

- "Guerre" -

L'accusation lui reproche notamment d'avoir eu de nombreux échanges avec l'assassin de Samuel Paty sur le réseau Twitter (devenu X). Elle aurait notamment présenté à Anzorov le cours de l'enseignant comme "l'illustration de la guerre menée par les institutions républicaines contre les musulmans".

Large pantalon noir, ample chemise verte, un foulard châtaigne lui enserrant le visage, Priscilla Mangel, convertie à l'islam à l'âge de 16 ans, affirme condamner sans réserve le terrorisme.

Pourtant, son parcours évoqué par la cour peut en faire douter.

Elle a été mariée à un homme connu pour son appartenance à la mouvance islamiste radicale. Elle est actuellement "mariée religieusement" avec un homme définitivement condamné à 14 ans de réclusion criminelle pour association de malfaiteurs terroriste.

"C'est un homme généreux, très avenant", soutient-elle, évoquant "des projets d'avenir" avec lui.

"Comment pouvez-vous être mariée avec quelqu'un qui a été condamné pour association de malfaiteurs terroriste?", l'interroge Virginie Le Roy, avocate des parents de Samuel Paty.

- "Je lui fais confiance. Il a toujours clamé son innocence", répond l'accusée.

"La justice n'est pas infaillible", insiste-t-elle.

Interrogée sur ses liens avec la mère d'un des assaillants du Bataclan le 13 novembre 2015, Priscilla Mangel explique que cette femme, condamnée depuis par la justice pour financement du terrorisme, est "une bonne personne qui n'est pas responsable de l'acte de ses enfants".

La cour interrogera les accusés sur les faits seulement à partir du 20 novembre.

Habillé avec élégance, gilet crème et chemise blanche, fin collier de barbe, Azim Epsirkhanov, qui est arrivé en France avec sa famille à l'âge de 10 ans, s'exprime dans un français parfait.

"La France est mon deuxième pays", dit-il après avoir rendu hommage à ses professeurs qui lui ont apporté "un grand soutien" durant sa scolarité.

"Mes parents m'ont appris à aimer ce pays", poursuit-il. La France est "le pays qui m'a accueilli, logé, nourri". "C'est un pays-mère pour moi", insiste le jeune Russe qui aurait aimé faire carrière dans la police ou l'armée françaises.

- "Donnant-donnant" -

C'est dans un collège d'Evreux qu'Azim Epsirkhanov rencontre pour la première fois Abdoullakh Anzorov, Tchétchène comme lui.

A propos de son ami, Azim Epsirkhanov reconnaît qu'il l'a vu changer d'attitude environ un an avant l'attentat. "Mais jamais j'ai pensé qu'il se radicalisait", assure-t-il.

Epsirkhanov a accompagné Anzorov dans une coutellerie de Rouen la veille de l'attentat. "Il m'a dit que (le couteau) était un cadeau pour son grand-père", explique le jeune homme.

La virée à Rouen a été effectuée avec Naïm Boudaoud, natif d'Evreux et ami d'Azim Epsirkhanov.

En pull jacquard blanc, Naïm Boudaoud, à l'allure frêle, fait plus jeune que son âge malgré son léger collier de barbe.

Entre Epsirkhanov, costaud de 1,84 m, et Boudaoud, il s'agissait d'une relation de grand à petit frère. L'un protégeant l'autre et Boudaoud, issu d'un milieu plutôt favorisé, rendant des services à son ami.

La cour d'assises spéciale de Paris, le 4 novembre 2024

La cour d'assises spéciale de Paris, le 4 novembre 2024

STEPHANE DE SAKUTIN - AFP

"C'était du donnant-donnant : Epsirkhanov le protégeait et lui l'aidait dans sa précarité", explique une enquêtrice de personnalité.

Même s'il affirme, comme Epsirkhanov, avoir tout ignoré du projet mortifère d'Anzorov, Naïm Boudaoud confirme avoir noté un changement chez lui. "Il ne fallait pas parler des filles, pas de relation sexuelle, pas d'alcool, pas de soirée", se rappelle-t-il. "J'ai pris ça à la rigolade", dit-il.

Le procès est prévu jusqu'au 20 décembre.

Par Alain JEAN-ROBERT / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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