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Laurent Fabius : "Il n'y a pas de vaccin" contre le changement climatique

Par La Rédaction

Laurent Fabius, ancien Premier ministre, président du Conseil constitutionnel, ancien président de la Cop 21, et auteur de "Rouge Carbone" (éditions de l'Observatoire) était l’invité du “petit déjeuner politique” de Patrick Roger le 2 décembre 2020 sur Sud Radio, à retrouver du lundi au vendredi à 7h40.

Laurent Fabius interviewé par Patrick Roger sur Sud Radio le 2 décembre 2020 à 7h40.

Laurent Fabius : "C’est vrai qu’on légifère beaucoup"

L’article 24 de la loi de sécurité globale sera intégralement remanié, après la vive opposition dans la rue. Certains jugent cet article inutile, les dispositions pour protéger les policiers existant déjà. Pour Laurent Fabius, c’est "une grande question" et rappelle que le Premier ministre avait annoncé qu’une fois voté, cet article serait soumis au Conseil constitutionnel, qu'il préside. "Je ne sais pas ce que deviendra l’article 24, je ne sais pas s’il nous sera soumis", s'interroge-t-il. "La difficulté, c’est à la fois faire tout ce qu’il faut pour lutter contre le terrorisme, et en même temps préserver les libertés, notamment la liberté de la presse", admet l'ancien ministre qui concède que "la conciliation n’est pas facile".

Les lois se multiplient en France, ce qu'admet également l’ancien Premier ministre, qui cite le juriste Guy Braibant : "Il en est de l’inflation législative comme de l’inflation tout court : plus on fait de lois, moins elles ont de valeur". "C’est vrai qu’on légifère beaucoup", commente Laurent Fabius qui ajoute qu’il "y a des lois qui arrivent avec, par exemple, 50 articles et qui ressortent avec 150 articles". Sur le risque de voir l’État de droit être supprimé par la multiplication des mesures sécuritaires, c’est-à-dire "le fait qu’il y a une séparation des pouvoirs, le fait que les grandes libertés sont assurées, ça, pour nous Français, c’est inamovible", estime l'ancien Premier ministre qui se veut rassurant. "Il y a quand même beaucoup de protections", affirme-t-il.

 

"Le Parlement peut tout à fait légiférer contre le terrorisme"

La libération de certains détenus condamnés pour terrorisme et ayant purgé leur peine, dans les années à venir, inquiète. Le gouvernement a tenté de créer un suivi spécifique de ces personnes, qui a été retoqué. "C’est un véritable problème", confirme-t-il. "Simplement, il faut prendre des moyens pour lutter contre le terrorisme qui soient conciliables avec un certain nombre de libertés", estime le président du Conseil constitutionnel. "Le Parlement peut tout à fait légiférer contre le terrorisme : il l’a fait et il le refera", assure Laurent Fabius.

L’État d’urgence sanitaire est jugé "liberticide" par une partie des Français, du fait des restrictions mises en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19. "Liberticide, c’est un mot général", estime l'ancien chef du gouvernement qui rappelle que son rôle est "de défendre les libertés" mais qu’il faut composer avec "des conciliations".

Le Conseil d’État comme le Conseil constitutionnel sont de plus en plus saisis par les députés ou les citoyens lorsque des sujets posent problème. Laurent Fabius n’estime pas pour autant qu’ils deviennent un "contre-pouvoir". "On a, dans la Constitution française, un système qui est qu’en amont des lois le Conseil d’État est consulté, il donne un avis, le gouvernement n’est pas obligé de le suivre, et en aval des lois le Conseil constitutionnel peut être saisi et nous, nous prenons des décisions", explique sont président. Ce sont des mécanismes qui "protègent le droit en amont et en aval", tout en n’étant pas "une garantie absolue". Cette protection est "tout à fait indispensable" pour garantir l’État de droit, répète-t-il.

 

"La mutation climatique est aussi grave" que la pandémie

Ancien président de la Cop21 de 2015, qui s’est tenue en décembre 2015, Laurent Fabius signe en cette fin d’année Rouge carbone, un livre qui sonne comme un message d’alerte sur l’environnement et la planète. Pour lui, il y a un "giga-paradoxe". "La pandémie Covid, c’est quelque chose d’extrêmement grave, et les gouvernements, à juste titre, prennent des mesures en matière économique, financière, sanitaire extrêmement fortes. Mais quand on y réfléchit, la mutation climatique est non seulement aussi grave, y compris en termes de santé, voire plus grave. Et là, il n’y a pas de vaccin".

Or, sur le climat, Laurent Fabius juge qu’on n’agit pas suffisamment, notamment parce qu’on dit "c’est plus tard, et on a tort, c’est aujourd’hui". Mais aussi parce que "l’ombre portée de la mort, si je puis dire, n’est pas aussi présente". "Tout ça est erroné", souligne l’auteur. "Une fois que vous avez envoyé dans l’atmosphère les gaz à effet de serre, ils ne retombent pas, ils restent 100 ans, 200 ans, 300 ans", rappelle-t-il. Et à un certain moment, cette situation devient "irrémédiable" ce qui nécessite que "les individus, nous, les scientifiques et les gouvernements agissent très fortement".

"Avec l’Accord de Paris, on a fixé les objectifs, fixé les moyens", rappelle l’ancien président de la Cop21. "Maintenant, il s’agit de l’appliquer", certains pays ne jouant pas le jeu, comme les États-Unis. "Pour le climat, la période Trump a été extrêmement négative", analyse Laurent Fabius, à la fois "pour les États-Unis" mais aussi pour "l'Accord de Paris" dont Donald Trump est sorti. Pour l’ancien Premier ministre, ça a donné "un billet de sortie" à des pays qui "ont signé l'Accord de Paris mais qui n’étaient pas enthousiastes".

 

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