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Ian Brossat : "c’est un fait établi qu’il y a du racisme dans la police"

Ian Brossat était l’invité du “petit déjeuner politique” de Patrick Roger le 8 juin 2020 sur Sud Radio, à retrouver du lundi au vendredi à 7h40.

Ian Brossat interviewé par Patrick Roger sur Sud Radio le 8 juin 2020 7h40.

Le Conseil scientifique appelle à alléger les règles du déconfinement en France afin de "laisser les gens vivre". Un appel lancé par Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique. Pour Ian Brossat, porte-parole du Parti Communiste Français (PCF), adjoint à la maire de Paris en charge du logement et porte-parole d'Anne Hidalgo pour les élections municipales, "si les autorités sanitaires considèrent qu’on peut accélérer le déconfinement, je pense qu’il faut le faire". Surtout que Jean-François Delfraissy n’est pas un "grand laxiste", souligne l’adjoint à la mairie de Paris.

 

"Les enseignants ont été soumis à des injonctions extrêmement contradictoires"

Quant à l’absence, remarquée, de nombreux enseignants dans les établissements scolaires, pour Ian Brossat cela est lié au protocole sanitaire. "Les enseignants ont été soumis, ces dernières semaines, ces derniers mois, à des injonctions extrêmement contradictoires." Le protocole sanitaire représente "60 pages de recommandations" avec "des choses qui étaient assez abracadabrantesques et extrêmement difficiles à mettre en œuvre". La faute est donc imputable, au moins en partie, au ministre de l’Éducation nationale, pour le porte-parole d’Anne Hidalgo.

Or, "aujourd’hui, le même ministre de l’Éducation nationale dit qu’il n’y a pas suffisamment de gamins à l’école". "S’il n’y a pas suffisamment de gamins à l’école, c’est qu’on a mis en place un protocole sanitaire extrêmement complexe", juge le porte-parole du PCF. "S’il est possible d’assouplir, de faire en sorte qu’il y ait plus de gamins qui reviennent à l’école, je pense que ce serait une bonne chose".

Notamment, selon l’élu, "le paysage de l’Éducation nationale au bout de deux mois de confinement, n’est pas glorieux" avec "beaucoup de gamins en décrochage scolaire", de la souffrance chez les enseignants et de l’inquiétude "chez les parents d’élèves et chez les élèves eux-mêmes", souligne-t-il.

"Ce qui est en train de se passer chez Renault est proprement invraisemblable"

Sur la crise économique et sociale qui se profile à l’horizon pour la France, Ian Brossat estime "qu’on a besoin d’aider les entreprises". "L’État a débloqué 100 milliards d’euros d’aides aux entreprises", rappelle-t-il tout en ajoutant qu’il "faut dans le même temps conditionner ces aides". "Il n’est pas normal qu’on donne des aides à des entreprises, notamment de grosses entreprises, qui dans le même temps continuent à verser de l’argent à leurs actionnaires et par ailleurs parfois procèdent à des licenciements".

Dans le collimateur du porte-parole d’Anne Hidalgo pour les municipales 2020, il y a le constructeur français Renault et son plan d’économies. "Ce qui est en train de se passer chez Renault est proprement invraisemblable". L’entreprise a en effet annoncé des licenciements et des fermetures de sites alors qu’elle a reçu "un prêt garanti par l’État de 5 milliards d’euros". "Quand on verse de l’argent, il ne doit pas y avoir de licenciements".

"Quand vous avez eu zéro de chiffre d’affaires durant deux mois, c’est très dur de payer son loyer"

Ian Brossat estime qu’il faut aider les petites et moyennes entreprises, raison pour laquelle la mairie de Paris a opté pour "zéro charge" pour les artisans et les commerçants et "la gratuité des loyers pour ceux qui sont sur des immeubles qui appartiennent à la ville de Paris pour une période qui peut aller jusqu’à 6 mois". "Quand vous avez eu zéro de chiffre d’affaires durant deux mois, c’est très dur de payer son loyer", explique Ian Brossat qui invite les autres propriétaires-bailleurs à lancer des mesures similaires tout en précisant : "on ne peut pas les y contraindre".

Ian Brossat tient toutefois à rappeler que, concernant les grosses entreprises ayant reçu des aides de l’État et qui licencient, "ça ne peut pas être 'prend l’oseille et tire-toi'". Pour lui, l’État doit conditionner ces aides et "fixer un certain nombre de conditions sociales et environnementales".

"C’est un fait établi qu’il y a du racisme dans la police"

Mardi 9 juin 2020, aux États-Unis sera organisé un hommage à George Floyd. Un hommage lui sera rendu en France également, place de la République à Paris. "Je participerai, je soutiens toutes ces manifestations qui ont lieu", précise le porte-parole du PCF. "Je pense qu’il y a une émotion mondiale sur cette question-là".

Partout dans le monde, ce sont les violences policières qui sont dénoncées dans ces manifestations. En France, notamment, la manifestation organisée sur impulsion de la famille d’Adama Traoré a regroupé plus de 20.000 personnes "ce qui est absolument considérable", estime l’adjoint au Logement de la ville de Paris. "On a besoin de s’attaquer à cette question du racisme et des discriminations, des contrôles au faciès qui sont proprement insupportables".

En France, selon Ian Brossat, "c’est un fait établi qu’il y a du racisme dans la police" et partout dans la société ; mais "je ne dis pas que la police est raciste", précise l’élu. "On a besoin de se mobiliser sur cette question".

En cas de faits de discriminations, il faut "une suspension à titre conservatoire du policier"

Le porte-parole du PCF fait une proposition, en cas de violences ou encore de discriminations de la part de la police : "à chaque fois que des faits comme ça sont signalés, on devrait avoir une suspension à titre conservatoire du policier en question en attendant l’enquête ou éventuellement la sanction définitive". Il rappelle que cette disposition existe dans la fonction publique et que "Christophe Castaner l’a fait une fois" lors de l’affaire de l’Île-Saint-Denis.

Ian Brossat revient sur "les images de ce gamin de 14 ans" qui "s’est fait défigurer" après une interpellation pour le vol d’un scooter. "Et les policiers qui ont fait ça sont encore en fonction ?", s’interroge le porte-parole d’Anne Hidalgo. "Qui peut admettre une chose pareille ?"

"Que le président de la République sorte de son silence"

Emmanuel Macron, s’il a demandé au gouvernement de se saisir de la question des violences policières et du racisme en général, ne s’est pas prononcé publiquement. Ian Brossat le regrette : "Je pense, sur une question comme celle-là qui concerne les valeurs de la République, qu’on a besoin d’une expression du président de la République".

Le porte-parole du PCF rappelle, d’ailleurs, qu’Emmanuel Macron, durant la campagne présidentielle de 2017, "avait dit que les contrôles au faciès étaient abominables". Mais, pour l’adjoint au Logement de la ville de Paris, "il n’a rien fait" sur cette question. "Or, c’est une question qui est très importante, notamment dans nos quartiers populaires". "Que le président de la République sorte de son silence", demande-t-il.

"On n’a pas besoin d’une police qui discrimine"

Alors que certains policiers s’inquiètent de ne plus pouvoir travailler dans de bonnes conditions, Ian Brossat concède qu’on "a besoin que la police fasse son travail". "On a besoin de policiers, nombreux, formés", dit l’élu qui est "favorable à un retour de la police de proximité". "Mais on n’a pas besoin d’une police qui discrimine".

Pour preuve d’une certaine discrimination de la police, le porte-parole d’Anne Hidalgo donne les chiffres d’une étude du Défenseur des droits publiée en 2019 "qui montre que quand on est un jeune noir ou maghrébin, on a 20 fois plus de risques d’être contrôlé par la police que quand on est blanc". "Ça induit un rapport à l’autorité qui est problématique". Il revient également sur son expérience de professeur à Sarcelles : "systématiquement mes élèves se faisaient contrôler dans le bus, je n’ai jamais été contrôlé de ma vie".

Les listes d’Anne Hidalgo semblent néanmoins montrer un nombre peu élevé de gens de couleurs. Un détail soulevé par Patrick Roger que Ian Brossat balaye : "il y en a". Il concède toutefois que "toutes les forces politiques ont un effort à faire dans ce domaine".

"Rachida Dati propose un retour en arrière"

Anne Hidalgo, maire sortante de Paris, est en tête des sondages pour les municipales 2020, devant Rachida Dati, candidate Les Républicains, et Agnès Buzyn, candidate LREM. Il reste pourtant trois semaines de campagne durant lesquelles ses équipes vont "rappeler nos propositions, rappeler ce que nous avons fait pendant la période du confinement, rappeler les transformations dont nous avons besoin". Et si, pour certains, Anne Hidalgo a déjà gagné, Ian Brossat rappelle que "ce qui fait qu’on a gagné ce sont les bulletins qui sont dans l’urne" et que "pour l’instant les urnes n’ont pas ouvert".

Le porte-parole d’Anne Hidalgo rappelle aux électeurs "qu’il faut aller voter". "Surtout si vous avez envie que Paris continue sa transformation sociale et écologique et que vous ne voulez pas d’un retour en arrière comme le propose Mme Dati".

Marché immobilier dans la capitale : "il est très difficile de prévoir à ce stade ce qu’il en sera"

Ian Brossat, en charge du logement à Paris, est directement concerné par la question de l’immobilier dans la capitale, où les prix ont explosé ces dernières années dépassant allègrement les 10.000 euros le mètre carré. Le marché post-crise du Covid-19 reste toutefois un mystère : "il est très difficile de prévoir à ce stade ce qu’il en sera".

Les équipes d’Anne Hidalgo ont toutefois un projet pour le prochain mandat : "créer une société immobilière, une foncière, qui sera chargée de faire du logement locatif à destination des classes moyennes". Il annonce que ces logements seront mis en location à un prix "20% inférieur en-dessous du prix de marché". Un projet qui sera mené en collaboration avec des fonds publics et privés.

L’adjoint au Logement de la mairie de Paris prévoit "des milliers de logements" mis ainsi en location. "Ce sont des logements soit que nous construirons, notamment dans nos zones d’aménagement, soit que nous rachèterons". Il présente notamment la possibilité de racheter des immeubles de bureaux que la foncière transformerait en immeubles d’habitations.

Il espère également que de nombreux logements mis en location sur Airbnb et qui, du fait de la crise, se retrouvent vides "puissent être reloués à des Parisiens".

"Il y a besoin de rétablir le droit à manifester"

Le 16 juin 2020 sont prévues des manifestations des soignants pour réclamer une réforme de l’hôpital public et une amélioration de leurs conditions de travail. Certains préfets ont toutefois annoncé qu’elles seraient interdites. "Rien ne justifie que les manifestations soient interdites", estime Ian Brossat. Alors que des manifestations se déroulent partout dans le monde, "allons-nous être le seul pays dans lequel les manifestations sont interdites ?".

"Il y a besoin de rétablir le droit à manifester", juge l’élu alors que tout recommence comme le travail, l’éducation, les sorties. Un droit à manifester qui reste néanmoins soumis aux gestes barrière : "on mettra des masques, on fera gaffe à ne pas être les uns sur les autres".

 

 

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