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Affaire Pegasus : "une analyse intime d’une partie de la classe politique française"

Bernard Carayon, maire de Lavaur, ancien député du Tarn, spécialiste des questions de guerre économique et de renseignements, et Damien Bancal, journaliste spécialiste des questions de lutte contre le cybercrime, blogueur sur le site Zataz.com, étaient les invités du débat du jour le 21 juillet sur Sud Radio, avec Philippe David et Judith Beller.

MAcron
Une bonne partie de la classe politique française, mais aussi des journalistes, écoutés via le logiciel Pegasus. (Ludovic MA / AFP)

"L’espionnage électronique n’est plus l’apanage des grandes puissances"

Pas moins de 14 ministres, le président de la République, de nombreux membres de la classe politique, mais aussi des journalistes tels qu’Éric Zemmour ou Edwy Plenel ont vu leur smartphone mis sur écoute via le logiciel d’une société israélienne, Pegasus. Le Maroc, un pays pourtant ami, revient régulièrement parmi les pays ayant effectué ces écoutes. "Ce n’est pas une histoire nouvelle. L’espionnage est l’un des métiers les plus anciens dans le monde, rappelle Bernard Carayon, maire de Lavaur et spécialiste des questions de guerre économique et de renseignements. En général, quand on parle d’espionnage, électronique ou humain, on accuse ceux qui en parlent d’être des paranoïaques. La réalité dépasse souvent la fiction. Ce qui est un peu humiliant, c’est qu’on avait l’habitude d’espionner l’Afrique, maintenant c’est l’Afrique qui nous espionne."

"Le président de la République, des membres du gouvernement, la classe politique française auraient été sur écoute, souligne l’ancien député du Tarn. On assiste à la fin du secret des entreprises, à la violation de l’intimité et de la vie privée des individus. Nous vivons de ce point de vue une époque particulièrement terrible. Elle est due à la démocratisation et à l’universalisation des technologies d’écoute et de renseignement. On le voit sur la liste des pays utilisant ce logiciel ; Rwanda, Togo, Azerbaïdjan. Aujourd’hui, l’espionnage électronique n’est plus l’apanage des grandes puissances."

 

50.000 numéros de téléphone possiblement espionnés par Pegasus (Omar Kamal - AFP)

"Un sérieux atout à un an des élections présidentielles"

"Ces révélations ne m’ont pas étonné, réagit Damien Bancal, journaliste spécialiste des questions de lutte contre le cybercrime, blogueur sur le site Zataz.com. Cela fait quelques années que l’on sait que cette entreprise, NSO, était très spécialisée dans l’espionnage. Après, je ne suis pas étonné par ses clients, car ce sont des outils très efficace. Mais ce n’est pas le seul outil qui permette d’espionner. Même nous, utilisateurs lambda, on peut trouver sur le Net des logiciels d’espionnage pour quelques dizaines d’euros. L’espionnage est malheureusement rentré dans les mœurs de l’informatique qui est dans notre vie, que ce soit l’ordinateur, le téléphone portable ou d’autres matériels informatiques. Là où cela devient plus inquiétant, c’est que cela touche nos hommes politiques, nos hommes d’État. Si on est un espion, on s’intéresse à un homme politique mais aussi à son environnement. Les espions ne se contentent pas de ce qui brille. Ce sera intéressant de savoir s’ils n’ont pas aussi 'environnementé' tous ceux qui travaillent autour du Président."

"La vraie question, c’est de savoir qui peut analyser les données collectées, souligne Bernard Carayon. Je doute fort que le Maroc en ait la possibilité humaine. Qui est derrière les services de renseignement marocains ? Si ce sont des sous-traitants, qui cela peut-il être ? Avec qui le Maroc entretient-il des relations privilégiées en termes de sécurité ? Au-delà, j’ai l’impression que l’on veut un peu noyer le poisson. On voit mal à quoi bon espionner certaines personnes si ce n’est pour avoir une vision précise, intime, de l’ensemble de la classe politique. Est-ce que la France va négocier avec le Maroc, ou un autre État, la possibilité de disposer des données ainsi collectées ? À un an des élections présidentielles, une telle analyse intime d’une partie de la classe politique française est un sérieux atout."

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