single.php

En exfiltrant le Premier ministre libanais, la France a fait ce qu'elle devait faire

Abandonner le Liban serait, pour la France, la pire des fautes morales.

 

Je ne suis pas toujours enthousiasmé par la politique étrangère d’Emmanuel Macron, mais l’action qu’il vient de conduire pour contribuer à désamorcer la crise libanaise est conforme à la vocation de la France lorsque se joue le sort de cet étrange pays qu’on appelle Pays des Cèdres.

C’est un petit pays par la superficie et la population mais il occupe dans l’imaginaire de l’Europe et de la Méditerranée une place que celui qui ne regarde que les statistiques jugera disproportionnée.

Il y a, dans les malheurs du Liban, quelque chose d’aussi émouvant pour l’homme occidental et méditerranéen que dans les malheurs de la Grèce ou le joug ottoman au XIXe siècle.

Avec 5000 ans d’histoire, le Liban n’est pas comme la Grèce le berceau d’une civilisation, mais le lieu de rencontre de toutes les civilisations de l’Orient et de l’Occident. Mosaïque improbable, miraculeuse, de peuples, de cultures et de religions, que les siècles ont déposé sur ses côtes et ses montagnes, à chaque fois qu’un Empire se disloquait, depuis les Phéniciens jusqu’aux Ottomans, des Grecs jusqu’aux Latins et aux Musulmans.

Le Liban est comme un point d’équilibre entre les civilisation. Ici, elles se réconcilient ou elles se font la guerre. Ce qui s’y passe n’est jamais anodin.

Il y a dans la relation de la France et du Liban un reste de l’imaginaire des Croisades, qui furent si longtemps regardé non comme des guerres de conquête, mais comme une voie du Salut. Elles ont laissé une empreinte de France dans les têtes et les coeurs. La France y est revenue, huit siècles après la chute des royaumes latins d’Orient, sur les ruines de l’Empire Ottoman, avec un mandat de la SDN. C’est la France qui décide les frontières d’un État libanais qui n’existe pas et qui fonde en 1906 la République libanaise.

En 1944, le Liban devient un État souverain, mais il faudra attendre 2008 pour que son grand voisin syrien reconnaisse pleinement cette souveraineté, après avoir mis ce pays sous tutelle pendant 15 ans. C’est la France qui préside à cette reconnaissance.

Pays multiconfessionnel, multiculturel, multi-ethnique, de par la nature des choses, où constitutionnellement, le président de la République est chrétien, le Premier ministre sunnite et le président du Parlement, chiite. Ce pays, petit par la taille, grand par ce qu’il représente et ce qu’y s’y passe, qui pourrait, qui devrait être la Suisse du Moyen-Orient, n’en finit pas de panser les plaies de tous les déchirements qu’il a vécu depuis 1975, lorsqu’il fut emporté par le conflit israélo-palestinien.

Le voilà au cœur de la rivalité entre les Chiites et les Sunnites, dans laquelle s’affrontent de grandes puissances qui, une fois encore dans l’histoire du Liban, dépassent ce petit pays.

En permettant d’exfiltrer le Premier ministre libanais, Saad Hariri, de l’Arabie Saoudite, sans prendre parti dans la guerre de religions, la France a fait ce qu’il fallait, ce qu’elle devait, tellement il est vrai qu’aujourd’hui, abandonner le Liban à son sort serait, pour la France, la pire des fautes morales.

Écoutez la chronique d'Henri Guaino dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard

 

L'info en continu
19H
16H
15H
14H
13H
12H
11H
10H
09H
Revenir
au direct

À Suivre
/