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Cinq ans après le mariage pour tous, les premiers homosexuels mariés se souviennent

Par Benjamin Jeanjean

Reportage Sud Radio. Cinq ans après l’adoption de la loi Taubira sur le mariage pour tous, près de 40 000 couples homosexuels se sont mariés en France. Pour beaucoup d’entre eux, cette loi a changé leur vie.

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"C’était quelque chose d’inespéré : étant homosexuel et différent, c’est un droit que je n’avais pas. C’était une reconnaissance, on était un couple à part entière et non plus un couple entièrement à part". Au micro de Sud Radio, Michel, un Parisien de 67 ans marié depuis trois ans, ne cache pas sa fierté à l’heure de se souvenir du bonheur procuré par ce nouveau droit ouvert pour lui et son compagnon, ensemble depuis 36 ans. Surtout que le contexte était loin d’être évident. "Ça représentait une victoire, à la suite de cette Manif pour tous qui était abominable de haine. C’était très violent pour moi", rappelle-t-il.

"Ça a changé le regard de la République"

Adoptée le 23 avril 2013, la loi Taubira a permis le mariage de près de 40 000 couples homosexuels jusqu’à aujourd’hui, soit environ 7000 par an. Vincent Boileau Autin a été le premier d’entre eux, en mai 2013 à Montpellier. "J’en garde un souvenir exceptionnel. Aujourd’hui, la société française a avancé grâce au mariage pour tous. On a réussi à réinstaurer le principe d’égalité en France, et ça a changé le regard de la République sur notre mariage. On a pu l’organiser au travers de cette loi, et grâce à elle notre amour est protégé. Nous bénéficions des mêmes droits que n’importe quel autre couple marié, et nous sommes une famille puisqu’il n’a échappé à personne que lorsqu’on se marie, on nous remet un livret de famille, qu’on ait des enfants ou pas", souligne-t-il.

Âgée de 62 ans, Brigitte, originaire de Clermont-Ferrand, a elle aussi vu sa vie changer suite à cette loi. "Ce qui a changé, c’est qu’en plus de prendre ma retraite, j’ai aussi et surtout pu adopter la fille que ma compagne a portée et que nous avons souhaité ensemble dans un projet qui s’appelait à l’époque projet de coparentalité. Ça avait une saveur d’autant plus particulière que, jeune femme, je n’avais jamais imaginé qu’il me serait un jour possible de me marier, tellement l’intégration des homosexuels n’était pas évidente. Jusqu’à 60 ans, j’ai eu l’impression d’être une citoyenne de seconde zone", assure-t-elle alors que Joël Deumier, président de SOS homophobie, insiste de son côté sur le sentiment d’homophobie toujours bien présent en France. "En 2017, on a constaté une augmentation de près de 20% des actes homophobes en France. Ça veut dire que même si le législateur fait des lois de progrès, l’homophobie persiste", lance-t-il.

Alliance Vita : "Un choix de société qui dépasse la question de l’homosexualité"

Pour les anciens opposants à ce mariage, la tenue des États généraux des lois bioéthiques est une occasion de poursuivre le combat. Président de l’association Alliance Vita, Tugdual Derville met en garde contre les risques selon lui engendrés par cette nouvelle donne. "Dès le début de notre engagement, nous avons dénoncé derrière l’expression caricaturale "Mariage pour tous" la pièce cachée "adoption". Or, c’est une bombe à retardement. Puisqu’il n’y a pas d’enfants adoptables, il y a une énorme pression sur la demande d’accès à des procréations artificielles qui, au fond, aboutissent à un droit à l’enfant. À partir de là, on se retrouve sous la pression d’un basculement de la France vers la marchandisation du corps. On est aujourd’hui exactement dans le débat qui avait motivé à l’époque notre engagement, c’est un choix de société qui dépasse complètement la question de l’homosexualité", déclare-t-il.

Un reportage d’Alice Berthias

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