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Notre-Dame-des-Landes : est-il encore possible d’aménager le territoire en France ?

L’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes pose la question du pouvoir politique de l’État et de l’exercice de son autorité dans un contexte conflictuel.

Militants anti-aéroport sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (©FRED TANNEAU - AFP)

Il faut replacer ce dossier dans un cadre beaucoup plus large. Il a duré 50 ans, a fait l’objet de pas loin de 200 recours judiciaires, et s’est vu opposer une violence – verbale et physique – très forte. Cette "juridicisation", qui fait durer les projets au fil de recours pas toujours pertinents, et cette violence sont les deux plaies auxquelles se heurtent les gouvernements. On bloque, et on fait durer, pour des raisons de gros sous (des associations qui cherchent juste à gagner de l’argent avec les recours) ou pour des raisons idéologiques. 

Mais la question qui se profile derrière, c’est de savoir s’il est encore possible d’aménager le territoire, de construire des aéroports, des voies de chemins de fer, des lignes à très haute tension, des autoroutes, des équipements publics... On occupe toujours des espaces et on bouscule toujours des intérêts particuliers. Bref, peut-on encore gouverner ? Comment trancher et arbitrer entre les intérêts contraires ? Comment décider ? Voilà ce que donne la coalition du droit à la dérive et de la brutalité de la force. Une fois de plus, il s’agit de restaurer l’État, qui est pris d’assaut de tous côtés. Il est pris d’assaut par l’Europe, la mondialisation, les autorités indépendantes, la finance globale, le régionalisme, le communautarisme, la concurrence élevée à la dignité de droit fondamental, etc.

Le problème ici, c’est que l’État a été lui-même consentant, voire le moteur de cette grande défausse du pouvoir politique qui ne sert personne, en réalité. L’exemple typique, c’est ce référendum organisé avec un électorat incertain, sans fondement juridique ou constitutionnel. Ici, On peut citer bien d’autres exemples au-delà de ce dossier. Celui par exemple du maintien à tout prix de la paix dans certains quartiers au détriment de la loi (drogue, port de la burqa, etc.).

Le gouvernement est évidemment le garant de la paix civile, et il est nécessaire qu’il ne soit pas un boute-feu et ne dresse pas les gens les uns contre les autres. Il doit savoir mettre fin à une crise et à un conflit. 1968 s’est fini par les accords de Grenelle, parce qu’il fallait en finir et parce que le gouvernement n’est pas le fauteur de guerre civile, contrairement à 1995 où Alain Juppé s’obstine jusqu’à ce que le pouvoir soit quand même obligé de reculer et de craquer dans les pires circonstances.

Il ne faut jamais confondre les voyous, les fanatiques qui empêchent la République de fonctionner, avec les révoltes des travailleurs, des désespérés, de ceux qui Victor Hugo appelait les misérables. Les zadistes ne sont pas les pêcheurs de 1994 qui n’arrivaient plus à vivre de leur travail. Ce qui est certain, c’est qu’à force d’abaisser l’État, qui se défausse sur l’international, les juges, l’Europe, etc., et qui renonce à l’exercice de sa propre autorité, on abaisse la démocratie et la liberté. À force d’entraver l’État, on fait monter l’étatisme. Un État partout, apparemment omnipotent, en réalité impuissant.

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