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La semaine qui a ravivé l’opposition entre la France du oui et la France du non

Entrée de l’extrême-droite au Parlement allemand, montée en puissance de Jean-Luc Mélenchon, grogne sociale en France… Le clivage entre le oui et le non en Europe est en train de reprendre des couleurs.

Manifestation contre la réforme du Code du travail à Bordeaux (©GEORGES GOBET - AFP)

Après cette semaine marquée par les élections allemandes, la prise de contrôle d’Alstom par Siemens, le débat sur le CETA, la polémique d’une violence inouïe autour de Jean-Luc Mélenchon, il y a bien deux Frances et pas trois. La France du oui et la France du non, dressées l’une contre l’autre (ce dont il ne faut pas se réjouir). On se souvient que ce clivage s’était dessiné lors du référendum sur Maastricht et réaffirmé lors du référendum sur la Constitution européenne. Contrairement aux apparences, il ne s’agissait pas seulement alors d’une opposition entre un oui et un non à l’Europe. C’était en réalité plus compliqué et plus profond.

Le oui était une forme d’acceptation de la fatalité d’avoir à imiter les autres et se couler dans un modèle unique que la mondialisation allait imposer petit à petit à toute la planète. La France du oui, c’est celle qui pense que le plus raisonnable est de faire converger à l’échelle planétaire les sociétés, les institutions, les cultures, les normes et les systèmes juridiques et politiques. En fait, le oui est une forme de soumission, et le non est un refus de cette soumission, plus ou moins perçue comme un renoncement à tout ce qui fait que la France est une nation et qu’elle a un rôle particulier à jouer sur la scène mondiale.

Le oui est un oui à la banalisation de la France comme préalable à sa dilution dans les grands ensembles, et par conséquent à son effacement. Le non est un non à la fin de ce qu’on a appelé l’exception française, qui exprimait non pas la supériorité de la France mais sa singularité. La France du oui, c’est celle qui veut coller à tout prix à l’Allemagne, quitte à s’y soumettre. C’est celle qui dit toujours oui à l’Allemagne, à l’Europe, à la mondialisation, au libre-échange, au CETA, au libéralisme, à la concurrence, au démantèlement du pacte social et civil et au programme du Conseil National de la Résistance, au relâchement des solidarités… C’est aussi celle qui dit oui à l’air du temps et celle qui croit qu’elle sait.

La France du non, c’est une France d’une multitude de résistances, bonnes ou mauvaises, qui ne peuvent s’accorder que dans le refus, mais pas pour constituer une majorité de gouvernement. Le macronisme, c’est l’union de la France du oui et de l’opposition frontale à la France du non. Il ne veut pas réconcilier ces deux Frances, comme le voulait Nicolas Sarkozy (sans y parvenir). Il veut abattre la France du non. Jamais depuis 25 ans un gouvernement n’a poussé cette opposition avec autant de violence. Violence des actes, des mots, des polémiques.

Mélenchon incarne en partie cette France du non. Il y a aussi le Front national, mais on ne l’entend pas et personne ne sait vers quoi il va pencher sur les questions économiques et sociales après le départ de Florian Philippot. Le grand vide est dans ce qu’on appelle la droite républicaine, depuis que les grandes voix gaullistes s’y sont tues. Si la droite reste enfermée dans la France du oui, comme elle a tendance à le faire depuis un certain temps, elle ne sera plus à la fin qu’une succursale du macronisme et ne servira plus à rien.

Le macronisme, en dressant aussi brutalement deux Frances l’une contre l’autre, veut mettre tout le monde au pied du mur. En divisant, il oblige à choisir son camp, mais plus la division sera profonde et plus le référendum s’imposera pour la trancher. Car la France du non peut au moins s’unir là-dessus : exiger des référendums, à commencer par le CETA. En tout cas, la stratégie d’écrasement de la France du non par celle du oui est une stratégie dangereuse. À force d’occulter la France du non, comme les États-Unis ont occulté l’Amérique du non et l’Allemagne a occulté l’Allemagne du non, on se retrouve avec Donald Trump et l’extrême-droite qui arrive au Parlement.

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