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Patrice Franceschi: "Si nous abandonnons les Kurdes, nous le paierons très cher"

Par Jérémy Jeantet

Patrice Franceschi, écrivain engagé auprès des Kurdes, était l'invité d'André Bercoff dans tous ses états sur Sud Radio.

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Alors que les affrontements font rage entre l'armée turcs et les Kurdes de la région d'Afrin, au nord-ouest de la Syrie, Patrice Franceschi, écrivain engagé auprès des Kurdes, dénonce "une guerre d'anéantissement" menée par l'armée turque.

Invité d'André Bercoff dans tous ses états, ce jeudi, il en appelle à Emmanuel Macron pour réagir et mettre fin au silence occidentale, qu'il considère comme "une faute morale et politique".

Nous sommes en train de ne rien dire des massacres de population. C'est une faute morale et une faute politique

"Depuis la bataille de Kobané, les Kurdes ont été nos compagnons d'armes sur le terrain, avec nos soldats, a expliqué Patrice Franceschi. Ce sont eux qui ont payé le prix du sang, avec des milliers de militaires tués et blessés, jusqu'à la prise de Raqqa cet été. Dans cette région, nous sommes en train de ne rien dire des massacres de population, ce qui, à mes yeux et aux yeux de tous les soldats français qui ont combattu, est une faute morale et surtout une faute politique. Si Daesh, d'un point de vue territorial, est anéanti, l'islamisme en tant qu'idéologie ne l'est absolument pas. Si nous abandonnons les Kurdes à leurs ennemis d'aujourd'hui, l'islamisme reviendra et nous aurons à nouveau des attentats en France. (...) C'est ce qui s'est passé avec l'Afghanistan, avec l'Irak. Nous sommes en train de reproduire les mêmes erreurs."

 

 

Désormais, Patrice Franceschi demande à être reçu par Emmanuel Macron, "pour que je puisse lui dire que les lobbys pro-Turcs, d'une Turquie qui n'a plus rien à voir avec la Turquie laïque que nous avons connue, sont au travail pour nous faire croire que la Turquie est toujours notre alliée et que ces Kurdes sont des terroristes comme les autres. Je veux dire au président de la République que tout cela est faux."

La Turquie, dans l'Otan, est un Cheval de Troie de l'islamisme

C'est ce "double discours" du régime turc que dénonce Patrice Franceschi : "La Turquie en joue en permanence en disant 'Je suis de l'Otan, je suis votre ami, laissez-moi faire et ce que je fais, je le fais pour nos intérêts communs, contre les terroristes'. Tout cela est faux. Ça me rappelle les discours d'Hitler dans les années 1930, 1935. On est à peu près dans le même genre. L'État turc n'est plus du tout ce qu'il a été quand il était notre allié dans l'Otan. Erdogan est un islamiste, c'est un Frère Musulman. L'armée turque, aujourd'hui, Allahu Akbar. Ils défendent les intérêts de leur Islam. Si on commence à dire que la Turquie est la même, qu'on met la tête sous le sable pour dire que tout va bien, on va le payer extrêmement cher d'un point de vue sécuritaire. Nos hommes politiques feraient mieux de tenir compte de ces changements radicaux. Au fond, la Turquie, dans l’Otan, est un Cheval de Troie de l’islamisme. Ceux qui disent aujourd’hui qu’il faut peut-être qu’elle quitte l’Otan n’ont pas forcément tort."

Ce n'est pas une guerre normale. C'est une guerre d'anéantissment

Mais aussi d'un point de vue moral, donc, explique Patrice Franceschi, qui craint que ne se reproduise le génocide arménien du début du XXe siècle : "Cela paraît incroyable, mais je pense que le régime turc, s’il pouvait faire aux Kurdes d’aujourd’hui ce qu’ils ont fait aux Arméniens il y a un siècle, ils le feraient. Quand on voit les vidéos de torture, de décapitation, ce n’est pas une guerre normale. C’est une guerre d’anéantissement. Les Kurdes le savent très bien. S’ils ne résistent pas, s’ils n’ont pas de soutien, les Turcs les passeront par le fil de l’épée jusqu’au dernier. Souvent, nos diplomates ne veulent pas le comprendre. Évidemment, les Turcs leur disent qu’ils ne veulent pas faire ça. Mais c’est juste pour nous endormir. Ils ne veulent plus entendre parler des Kurdes, ils veulent même faire oublier que leur nom a existé dans l’Histoire. Il y a un siècle, c’était la même chose avec les Arméniens, mais ils l’ont fait. Après, il y a eu les Khmers, les Juifs. Il ne faut pas croire que c’est impossible."

"Je pense qu’on va se ressaisir politiquement. Rien n’est perdu. On peut faire la part des choses, faire quelques concessions aux Turcs s’ils retournent en Turquie et trouver une solution pour sortir de la guerre", veut-il croire malgré tout.

Écoutez l'interview de Patrice Franceschi, invité de l'émission André Bercoff dans tous ses états

 

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