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Quand certaines régions ne veulent plus payer pour d'autres

Alors que le référendum en Catalogne a donné des idées à la région Lombardie-Vénétie en Italie, Henri Guaino nous explique que tout ça est avant tout une histoire de "gros sous". Certaines régions ne voulant plus payer pour d'autres.

Jamais on a brandi autant de bons sentiments : les droits humains, la solidarité, l'humanitaire, le devoir de protéger, la lutte contre les discriminations et pourtant, jamais on a vu le monde livré à autant de cynisme, de cupidité et d'égoïsme, alors que la nécessité du partage n'a peut-être jamais été aussi grande.

On assiste à une montée des égoïsmes. Plus personne ne veut payer pour les autres. Derrière les arguments pseudo-politiques et idéologiques, c'est bien le refus de partager qui l'emporte. Les Américains quittent l'Unesco, d'abord parce qu'ils ne veulent plus payer. Ils refusent de souscrire à une augmentation du capital de la Banque mondiale parce qu'ils ne veulent pas payer pour l'aide au développement. Ils appellent les fonctionnaires du FMI à baisser leur salaire parce qu'ils trouvent que le Fond leur coûte trop cher et que ce dernier dépense l'argent des États-Unis pour aider des pays qui gèrent mal leurs affaires. Il en est de même pour l'Otan.

Ont-ils tort ? Les finances publiques américaines ne sont pas vraiment non plus un modèle de bonne gestion qui peut les autoriser à donner des leçons avec une dette publique qui dépasse les 20 000 milliards de dollars et un système financier dont on se souvient ce qu'il a coûté au monde entier lors de la crise des subprimes. Mais l'Amérique de Trump n'est pas la seule à faire preuve aussi ouvertement d'un tel cynisme et d'un tel égoïsme. Regardez l'Allemagne : certes elle accueille des réfugiés, mais elle ne veut pas beaucoup payer en Europe. On se souvient de l'affaire de la Grèce et des leçons permanentes de Wolfgang Schäuble (ex-Ministre fédéral allemand des Finances) qui vient de quitter le ministère de l'Économie allemande. C'est une tendance planétaire. 

Si la mondialisation a permis ces dernières années de sortir des centaines de millions de gens de la misère, les chiffres sont néanmoins faussés par la Chine et l'Inde. C'est surtout la fin des systèmes communistes et des économies socialistes qui a fait monter les niveaux de vie de beaucoup de gens et notamment en Chine, depuis les réformes de Deng Xiao Ping. La Chine est un "passager clandestin" dans la mondialisation et c'est cela qui a profité à quelques centaines de millions de Chinois. Le principal effet de la mondialisation, en réalité, est d'accroître les inégalités, de faire des gagnants qui gagnent beaucoup plus et des perdants qui perdent beaucoup plus. Pour que cela dure - c'est la théorie mais aussi la réalité sociale et politique - il faut que les gagnants indemnisent les perdants. C'est-à-dire, davantage de redistributions. 

Soit on amorti les chocs en se protégeant un peu, soit on partage ! Avant, les régions riches avaient besoin des régions pauvres pour fabriquer à bas coût, pour trouver une réserve de main d'œuvre faiblement rémunérée. Aujourd'hui, cette complémentarité à l'intérieur d'un même pays, est cassée puisqu'il est possible d'aller chercher les meilleurs coûts n'importe où dans le monde. Donc, les régions gagnantes dans la mondialisation voient de moins en moins de raison d'intervenir et de payer pour les régions les moins favorisées, à l'intérieur de la nation. Elles ont la tentation de tourner le dos à la solidarité nationale... On la vu en Catalogne et on le voit également en Belgique avec l'opposition Flandre/Wallonie. Il y a certes une histoire de culture et de langue, mais il y a d'abord une histoire de gros sous.

Le problème, c'est que la mondialisation et la paix ne survivront pas à l'égoïsme des gagnants et à la révolte des perdants...

>> L'intégralité de la chronique est disponible en podcast

 

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