Il y a le développement d’une société, d’une économie, ce grand mouvement d’ensemble qui entraîne toutes les parties d’une société et qui comprend à la fois le qualitatif, le quantitatif, la population, le niveau de vie, etc. Mais en général, on nous parle de la croissance quantitative, celle du PIB. Dans cette croissance, il n’y a pas l’immense sphère du non-marchand, tout ce qui ne se vend ni ne s’achète. Un économiste disait que si tout le monde divorçait et embauchait sa femme comme femme de ménage, le PIB doublerait quasiment… Rien non plus sur la qualité des biens et services, sur la richesse du stock de capital humain. En fait, c’est une mesure de la production, qui peut être positive (croissance) ou négative (récession). Mais on ne retranche pas l’usure, l’obsolescence. Si les rails, les routes, les réseaux électriques, les bâtiments, les machines vieillissent, on fait comme si rien ne se perdait. Citons aussi la pollution, les encombrements, le stress… Dans le PIB, les catastrophes naturelles ne sont pas non plus prises en compte. Un incendie ou un tremblement de terre fait augmenter le PIB en créant de l’activité (pompiers, reconstruction des maisons, etc.).
Il est très intéressant de se pencher sur cette question quand on voit la situation actuelle de la SNCF. Pendant des décennies, on n’a pas investi pour entretenir le réseau, il s’est donc dégradé et on n’a pas retranché de la croissance cette énorme perte de richesse. Rendez-vous compte : la SNCF prévoit sur la période 2017-2026 46,2 milliards d’euros d’investissements pour essayer de remettre le réseau en état. On se bat pour un demi-point de croissance de PIB alors que plus personne ne sait de quoi on parle. Ça n’a aucun sens par rapport à la manière dont les gens vivent. C’est un indicateur qui devient biaisé si on l’analyse en oubliant ce qu’il signifie.